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« Ils n’avaient qu’un coup de fil à passer mais ils n’ont rien fait » : enquête ouverte après la mort du nouveau-né d’une migrante

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Une patrouille de la gendarmerie à Oye-Plage (Pas-de-Calais), le 31 janvier 2020. Une patrouille de la gendarmerie à Oye-Plage (Pas-de-Calais), le 31 janvier 2020.

Fin août 2020, dans l’arrière-pays calaisien, Anas, 9 ans, et Eilarya, 2 ans, jouaient dans le jardin d’une grande maison de famille. Leur petite sœur « était dans le ventre », comme le racontaient au Monde leur mère Rwpak, 35 ans, et leur père Hazhar, 40 ans, migrants clandestins originaires de la province de Souleymanieh, au Kurdistan irakien. Ensemble, ils avaient déjà tenté deux fois la traversée de la Manche dans une petite embarcation, malgré la grossesse très avancée de Rwpak, à un mois du terme. « Bien sûr, on a très peur, l’eau ça fait très peur. Les enfants ont très peur, ma femme enceinte a très peur. Mais je préfère qu’on soit morts dans l’eau plutôt que de vivre au Kurdistan », expliquait Hazhar, derrière ses lunettes qui lui donnaient davantage l’air d’un professeur que d’un mécanicien, sa profession en Irak. A ses côtés, sa femme avait l’air effrayé, mais décidé.

Quelques jours plus tard, le 9 septembre 2020, dans le carré musulman du cimetière de Calais, la famille a enterré la petite Aleksandra, née en grande détresse le jour de l’arrestation de sa mère à Oye-Plage (Pas-de-Calais) par une patrouille de gendarmerie. Rwpak et Hazhar, assistés de Me Julie Gommeaux, viennent d’adresser une plainte dont Libération et Le Monde ont pris connaissance contre les forces de l’ordre, le 19 février 2021, au procureur de la République de Boulogne-sur-Mer pour « violences volontaires sur une femme en état de grossesse ayant possiblement causé le décès de son enfant à la naissance ». L’inspection générale de la police nationale (IGPN) a été saisie de l’affaire « et la prend très au sérieux », précise l’avocate.

Dans les hautes herbes

Ce 2 septembre 2020, la nuit est plutôt claire. A telle enseigne que les tentatives pour franchir la Manche se multiplient : 41 en quelques heures, précise la préfecture du Pas-de-Calais, pour « un total de 592 migrants recensés ». Pressée d’arriver en Angleterre pour que les enfants puissent faire leur rentrée des classes, et Rwpak accoucher sur place, la famille kurde espère que cette troisième fois sera la bonne. Sur cette plage située entre Calais et Dunkerque, ils sont une petite dizaine – une autre famille et deux hommes seuls les accompagnent – cachés dans les hautes herbes qui bordent une partie de l’étendue de sable, où est également dissimulée une embarcation pneumatique.

Le semi-rigide est sur le point d’être mis à l’eau lorsqu’une patrouille de gendarmerie surgit. Les gendarmes confisquent aussitôt le moteur du bateau et emmènent les migrants sur le bord de la route afin de saisir leurs gilets de sauvetage. C’est à partir de cet instant que le récit des autorités et celui des membres de la famille divergent.

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