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Tunisie : la joueuse de tennis Ons Jabeur veut « intégrer le top 10 mondial »

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La joueuse tunisienne Ons Jabeur au tournoi de Melbourne, l’Open d’Australie, le 12 février 2021. La joueuse tunisienne Ons Jabeur au tournoi de Melbourne, l’Open d’Australie, le 12 février 2021.

Ons Jabeur a quitté Melbourne après avoir été éliminée au troisième tour de l’Open d’Australie, l’un des tournois du Grand Chelem, par la Japonaise Naomi Osaka (3-6, 2-6). Aujourd’hui au Qatar, celle qui s’est hissée au rang de 30joueuse mondiale prépare les tournois de Doha et Dubaï, avec son entraîneur Issam Jelali et son préparateur physique Karim Kamoun, qui est aussi son mari.

Un an après le début de la pandémie de Covid-19, la jeune femme, qui compte parmi les sportives les plus en vue du continent africain, se livre sur sa vie en temps de restriction sanitaire, mais aussi sur ses ambitions et sur son pays, la Tunisie.

Vous venez de passer plusieurs semaines en Australie où les conditions sanitaires sont drastiques. Comment l’avez-vous vécu ?

Ons Jabeur. J’ai d’abord passé deux semaines dans un hôtel, avec interdiction de quitter ma chambre, car j’étais cas contact. Quinze jours sans sortir, sans pouvoir s’entraîner, c’est très long, surtout pour préparer un tournoi. Il a fallu chercher un moyen de travailler physiquement, ce qui n’est pas facile dans une chambre d’hôtel !

Sur une vidéo postée sur les réseaux sociaux, on vous a vue travailler votre revers en envoyant la balle sur votre matelas posé contre le mur…

Oui, car il fallait que je touche la raquette au moins une trentaine de minutes par jour. J’ai trouvé cette astuce. Sinon, je courais dans la chambre, pour le cardio. Je faisais aussi des abdos et j’ai pu faire venir un vélo d’appartement et un tapis de course. Mais cela ne remplace pas un véritable entraînement.

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D’ailleurs, en compétition, j’ai parfois senti que la préparation n’avait pas été idéale. De toute manière, il faut s’adapter à ce que décident les pays qui organisent des tournois. Ce n’est pas à nous d’imposer quoi que ce soit.

En temps que sportive de haut niveau, comment avez-vous vécu l’année écoulée ?

Honnêtement, je m’habitue aux tests, aux mesures sanitaires. Il faut faire avec. Au moins, on joue ! Souvent, il n’y a pas de public, ou alors en petit nombre, comme en Australie. C’est une ambiance particulière, mais c’est mieux qu’il y a un an. A l’époque, tout s’était arrêté. J’étais rentrée en Tunisie et on ne savait pas quand les tournois allaient reprendre. Ce n’était pas facile de se préparer sans avoir de perspectives.

Je pense quand même avoir bien travaillé. Je me suis entraînée, j’ai réfléchi à mon jeu, à ce que je devais améliorer. Et puis j’ai pu passer du temps avec ma famille, cela m’a fait du bien, car je voyage beaucoup toute l’année. Aujourd’hui, je suis heureuse d’avoir pu reprendre la compétition. Cela me manquait.

On parle peu des aspects financiers. Ces longs mois d’inactivité vous ont-ils impactée ?

Oui, bien sûr. On perd de l’argent puisqu’il n’y a pas de tournois. Mais je pense que ça a surtout été compliqué pour les joueuses et les joueurs classés au-delà de la quatre-vingtième place. Il y a cependant eu des aides, par exemple de l’Association des joueuses professionnelles (WTA) pour limiter l’impact financier de la crise.

Vous avez déclaré récemment vouloir intégrer le top 10 mondial. Qu’est-ce qui vous fait penser que cet objectif est réalisable en 2021 ?

J’ai eu de bons résultats en 2020 [la joueuse a atteint les quarts de finale de l’Open d’Australie, et les huitièmes de finale de Roland-Garros]. Je crois que mon jeu s’est amélioré. Tactiquement, mais aussi physiquement. Je gère beaucoup mieux mes efforts. Je suis quelqu’un de rigoureux, je ne sors quasiment jamais.

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Enfin, mentalement, j’ai aussi progressé, je suis encore plus concentrée sur mon jeu. Pour toutes ces raisons, je pense que je peux atteindre mon objectif d’intégrer le top 10. Il faut que je gagne des titres, que j’obtienne des résultats dans les tournois du Grand Chelem.

Vous êtes très populaire en Tunisie, mais également dans le monde arabe. Avez-vous l’impression que vos résultats contribuent, notamment dans votre pays, au développement du tennis, et notamment chez les femmes ?

Je ne pense pas que le tennis sera un jour plus populaire que le football en Tunisie ! Mais je sais que de plus en plus de gens suivent mes matchs, même des personnes qui ne connaissent pas bien le tennis. Avant la pandémie, on m’avait montré des images de cafés dans lesquels des Tunisiens suivaient mes rencontres. Ils restaient une heure et demie devant la télé, jusqu’à la fin du match. Cela me faisait vraiment plaisir.

Je sais aussi que de plus en plus de parents inscrivent leurs enfants dans des clubs. Tant mieux si mes performances incitent des jeunes ou des moins jeunes, filles et garçons, à jouer au tennis en Tunisie, mais aussi dans d’autres pays arabes.

En Tunisie, il y a depuis plusieurs semaines de nombreuses manifestations d’une partie de la jeunesse, inquiète, voire désemparée, face au manque de perspectives d’avenir. Comprenez-vous cette colère ?

La Tunisie a connu une révolution en 2011. Depuis, il y a des hauts et des bas. Nous sommes confrontés à une crise économique qui a été encore aggravée par l’épidémie de Covid-19. Pour beaucoup de mes compatriotes, quel que soit leur âge, c’est difficile. Des personnes ont perdu leur emploi, d’autres ne parviennent pas à en trouver un.

La Tunisie est un pays qui vit notamment du tourisme. Cela représente des milliers d’emplois. Or, avec la crise sanitaire, il y a eu beaucoup moins de visiteurs que d’habitude. Des jeunes veulent quitter le pays parce qu’ils pensent qu’ils ne trouveront pas de travail. L’Etat cherche sans doute des solutions, pour mieux aider les gens. Il paraît qu’il faut du temps pour voir les effets d’une révolution. Mais j’espère vraiment que, bientôt, la situation s’arrangera et que le Tunisie sortira de cette période difficile.

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