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OpenLux : l’insatiable appétit des Français pour les sociétés luxembourgeoises

Par Anne Michel , Maxime Vaudano et Jérémie Baruch

Publié aujourd’hui à 06h01, mis à jour à 07h01

Ils sont plus nombreux que les Italiens et les Allemands réunis, et plus nombreux que les Luxembourgeois eux-mêmes : près de 15 000 Français figurent sur la liste des propriétaires de sociétés luxembourgeoises, reconstituée par Le Monde pour l’enquête OpenLux.

On y trouve des grands patrons et leurs entreprises, des médecins et des collectionneurs d’art, des footballeurs et des producteurs de cinéma, des consultants et des pilotes de moto, des écrivains et de riches héritiers, des propriétaires fonciers et des figures de la « start-up nation », des dirigeants de PME et des arnaqueurs professionnels. Leurs points communs : de l’argent à faire fructifier et le goût de la discrétion.

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La présence de ces Français au grand-duché de Luxembourg s’explique-t-elle seulement par « le nombre important d’expats et de frontaliers français » qui vivent ou travaillent sur place, comme l’assure le gouvernement luxembourgeois ? De nombreux indices permettent d’en douter. D’abord parce que 56 % de ces 15 000 Français ont déclaré aux autorités qu’ils résidaient en France, et seulement 27 % au Luxembourg. Mais surtout parce que l’immense majorité de leurs sociétés sont en réalité des holdings financières sans bureau ni activité économique sur place – de pures boîtes à lettres.

Selon nos calculs, inédits, basés sur l’extraction automatique de milliers de bilans financiers, ces Français possèdent des dizaines de milliards d’euros d’actifs dans des sociétés luxembourgeoises : 40 milliards si l’on s’en tient aux résidents français, 100 milliards pour l’ensemble des ressortissants français, ce qui représente l’équivalent de 4 % du PIB français.

Sur ce total, à peine 7 milliards d’euros sont stockés dans des comptes en banque. Car au Luxembourg, comme ailleurs, la richesse s’investit : la grande majorité des 15 000 Français utilisent le Luxembourg comme base pour investir dans des entreprises situées dans d’autres Etats. Rien d’étonnant à cela, selon le ministre luxembourgeois des finances, Pierre Gramegna : « Les sociétés détenant des participations existent dans de nombreux pays, y compris la France. Il est tout à fait logique qu’une entreprise opérant à l’échelle mondiale choisisse un ou plusieurs centres pour centraliser ses activités de financement et ses participations financières. »

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Réinvestissement à coût zéro

De fait, regrouper ses participations dispersées dans une société holding afin d’en faciliter la gestion fait partie du b.a.-ba des affaires. Mais choisir le Luxembourg plutôt que la France présente tout de même quelques avantages : un supplément de flexibilité et une facture fiscale allégée. Ainsi, un Français n’est pas taxé lorsqu’il revend une participation logée dans sa holding luxembourgeoise, alors qu’il le serait à hauteur de 4 % en France. Les profits issus de ses investissements ne sont pas non plus soumis à l’impôt, tant qu’ils restent au Luxembourg et ne sont pas reversés sur son compte en banque en France. Ils peuvent être réinvestis à coût zéro depuis le Grand-Duché.

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