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En Birmanie, l’armée, un Etat dans l’Etat, nationaliste et raciste

Des soldats birmans sont postés à l’intérieur de l’hôtel de ville de Yangon, en Birmanie, le 2 février. Des soldats birmans sont postés à l’intérieur de l’hôtel de ville de Yangon, en Birmanie, le 2 février.

La reprise du pouvoir par l’armée birmane, lundi 1er février, s’inscrit dans la logique d’une doctrine idéologico-militaire ancrée dans l’histoire de conflits internes permanents qui a forgé le présent postcolonial du « Myanmar » (nom officiel de la Birmanie). De cette vision a émergé, pour les militaires birmans d’hier et d’aujourd’hui, la certitude d’avoir un rôle central à jouer : celui d’être les garants d’une unité nationale fantasmée.

L’armée n’a jamais cessé, depuis l’indépendance de 1948, d’être un Etat dans l’Etat, même durant les rares années où elle ne fut pas directement aux commandes : entre 1962 et 2011, la Birmanie aura été sans interruption placée sous le joug des généraux, période émaillée de soulèvements populaires brutalement réprimés, d’un troisième coup d’Etat et d’une purge interne.

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En dépit du passage de témoin à un gouvernement démocratiquement élu en 2015, une première depuis 1961, la Tatmadaw (forces armées birmanes) est restée une institution dominée par une caste d’officiers dédaigneux du pouvoir civil, menant à sa guise ses guerres et ses batailles. Jusqu’à confirmer, en 2017, au cours de l’une des pires orgies de violence de l’histoire du pays, la réputation de cruauté de ses soudards quand l’armée tua, viola et chassa au Bangladesh voisin une grande partie de la population de la minorité musulmane des Rohingya. L’ONU accusera les généraux, et parmi eux le premier d’entre eux, le chef de l’armée Min Aung Hlaing, d’« intentions génocidaires ». Aujourd’hui, c’est cet homme-là, âgé de 64 ans, qui est le maître de la Birmanie.

Aung San Suu Kyi et le chef de l’armée birmane, le général Min Aung Hlaing (à droite), au palais présidentiel de Naypyidaw, en Birmanie, en mars 2016. Aung San Suu Kyi et le chef de l’armée birmane, le général Min Aung Hlaing (à droite), au palais présidentiel de Naypyidaw, en Birmanie, en mars 2016.

Le 22 décembre 2020, le patron de la Tatmadaw avait rappelé la raison d’être de cette dernière : « L’armée et l’Etat sont des institutions nécessaires et la Tatmadaw est nécessaire au devoir de défense de l’Etat. » Il avait ensuite ajouté une précision d’importance, élargissant le concept du rôle des forces armées : ces dernières doivent être aussi les figures de proue de la défense « des politiques nationales, de la sasana [religion bouddhiste], des traditions, des coutumes et de la culture ». Cette redéfinition d’importance fit dire au chercheur birman Amara Thiha, du think tank indépendant Myanmar institute for peace and security, que les « militaires ne se positionnent ni au-dessous, ni au-dessus de l’Etat : ils forment une institution parallèle centrée sur le devoir de défense [de la nation]. »

Des soldats montent la garde à un poste de contrôle militaire mis en place sur la route du Congrès, en Birmanie, le 1er février. Des soldats montent la garde à un poste de contrôle militaire mis en place sur la route du Congrès, en Birmanie, le 1er février.

Guerres internes

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