Publié le : 29/01/2021 – 16:55
Fin 2016, après d’âpres négociations et un référendum perdu, le gouvernement colombien et la guérilla des Farc signaient un accord de paix historique. Quatre années plus tard, le cycle de la violence en Colombie ne s’est pas interrompu. Le pays reste confronté à des attaques contre des civils, à l’assassinat de leaders locaux et d’anciens combattants démobilisés. Nos reporters ont rencontré des anciens membres des Farc qui ont refait leur vie et tourné la page de la guerre, bien conscients que cette paix est incertaine et difficile.
Le 7 octobre 2016, l’ex-président colombien Juan Manuel Santos recevait le prix Nobel de la paix pour ses efforts en faveur de l’accord mettant fin à un demi-siècle de conflit avec la guérilla des Farc (Forces armées révolutionnaires de Colombie).
Quatre ans plus tard, dans les rues de Bogota, face au Parlement et au Palais présidentiel, les anciens guérilleros réclament plus de protection et l’application intégrale de l’accord de paix. Une scène impensable il y a encore quelques années, qui donne une idée du climat qui règne actuellement en Colombie.
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L’un d’eux, José « Chucho » Zamora, explique : « Nous n’avons pas atteint notre but ultime, qui était la prise du pouvoir, mais nous continuons à travailler dans cette perspective avec les gens, avec les masses, et maintenant avec nos enfants. C’est une expérience merveilleuse de pouvoir marcher ici avec eux, malgré la peur qui nous tenaille car on nous assassine ».
En 2017, 13 000 combattants des Farc avaient déposé les armes
Depuis le 1er décembre 2016, les combattants de la guérilla sortent peu à peu de la clandestinité, rendent les armes et reviennent à la vie civile. Mais en 2018, à la suite de l’élection du président conservateur Ivan Duque, les accords de paix sont remis en cause par le nouveau gouvernement.
Ce revirement provoque un regain de violence dans le pays : 250 anciens membres des Farc sont assassinés. Guérillas, paramilitaires et narcotrafiquants se disputent à nouveau le contrôle de certaines zones du territoire colombien. L’Histoire semble alors bégayer.
La guérilla des Farc a débuté en 1964. Ce conflit interminable a profondément façonné la société colombienne. Humberto De la Calle, ex-négociateur de paix du gouvernement Santos, rappelle le bilan d’une guerre d’un demi-siècle qui a fait « 8 millions de victimes, dont 7 millions sont des paysans déplacés. On estime que les morts sont au nombre de 300 000 ».
Le gouvernement d’Ivan Duque hostile à toute concession
Le diplomate regrette qu’aujourd’hui, l’accord de paix se heurte à l’opposition d’un important secteur politique, notamment avec l’instauration du « Tribunal pour la Paix » qui offre une certaine impunité aux coupables de crimes graves en contrepartie de leur témoignage pour établir la vérité historique sur certains évènements. « L’objet de ce tribunal est de convoquer tous les auteurs d’exactions : les Farc, comme les militaires qui ont failli à leur devoir, et aussi des non-combattants qui ont financé la confrontation. C’est cela qui génère des résistances » explique-t-il.
Dans ce climat, le retour à la vie civile des anciens combattants des Farc est plus compliqué que prévu. Avec une économie en crise, José Zamora, explique que « l’exclusion économique et sociale mène de nombreux ex-combattants au désespoir. C’est un bouillon de culture parfait pour que les gens justifient leur retour aux armes et à la clandestinité ».
Ces dernières années, 2 000 à 3 000 ex-guérilleros auraient repris les armes, mais beaucoup continuent de croire en cette paix incertaine, dans une société qui ne leur a pas encore tout à fait pardonné.
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