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Un néonazi condamné à la perpétuité en Allemagne pour le meurtre d’un élu pro-migrants

Stephan Ernst, devant le tribunal de Francfort, en Allemagne, jeudi 28 janvier 2021. Stephan Ernst, devant le tribunal de Francfort, en Allemagne, jeudi 28 janvier 2021.

Il avait abattu d’une balle dans la tête un élu pro-migrants. Jeudi 28 janvier, un néonazi allemand a été condamné par un tribunal de Francfort à la prison à perpétuité, dont une période de sûreté de quinze ans.

« La condamnation pour meurtre ne laisse aucune place au doute concernant la culpabilité » de Stephan Ernst, 47 ans, a expliqué le président du tribunal de Francfort, Thomas Sagebiel, lors de l’énoncé du verdict. « Nous savons que nous pouvons difficilement mesurer votre perte et que le procès a été très douloureux pour vous. Notre tâche consistait à mener une procédure équitable et à juger sans tenir compte des intérêts personnels », a-t-il ajouté à l’intention de la famille de la victime.

Dans la nuit du 2 juin 2019, Walter Lübcke, un élu de 65 ans de l’Union démocrate d’Allemagne (CDU, parti conservateur) de la chancelière, avait été abattu presque à bout portant par Stephan Ernst, militant néonazi, alors que Lübcke fumait une cigarette sur la terrasse de sa maison, à Kassel, dans la Hesse.

Lire l’enquête : En Allemagne, aux racines de la violence d’extrême droite

Connu des autorités depuis la fin des années 80

Après deux semaines d’enquête, M. Ernst est interpellé. Il accuse aussi un complice présumé, Markus Hartmann, également jugé dans ce procès qui a débuté le 16 juin. Son complice présumé est accusé de l’avoir entraîné au tir en forêt, « y compris avec l’arme utilisée » pour le meurtre, sans pour autant être « au courant des plans réels » de Stephan Ernst. Il a finalement été condamné à une peine d’un an et six mois avec sursis pour possession prohibée d’armes. Les deux suspects avaient, selon l’accusation, assisté ensemble, ulcérés, à une réunion publique au cours de laquelle Walter Lübcke, alors préfet, avait apporté son soutien à la politique migratoire généreuse décidée par la chancelière, Angela Merkel. Plus d’un million de réfugiés ont été accueillis en Allemagne entre 2015 et 2016. Une politique qui passait concrètement par l’installation de foyers de réfugiés un peu partout dans le pays, et en particulier dans la bourgade de Lohfelden, ce qu’est venu expliquer Walter Lübcke à ses concitoyens.

Déjà condamné à six ans de prison pour avoir fait exploser une bombe devant un foyer de demandeurs d’asile en 1993, Stephan Ernst était connu des autorités depuis la fin des années 1980 comme un sympathisant néonazi au potentiel violent. En 2009, il avait participé à une émeute raciale à Dortmund. Malgré ce passé chargé, les services de renseignements avaient cessé ces dernières années de le surveiller.

L’enquête a révélé une autre erreur de la police, déjà souvent accusée dans le passé de complaisance à l’égard des néonazis : elle n’a pas signalé à l’autorité délivrant les permis de port d’armes que le complice présumé était un membre toujours actif de l’ultradroite. Cela lui a permis de se procurer pistolets et fusils. Le Parlement de la Hesse va mener des investigations sur les dysfonctionnements et les ratés de l’enquête.

Terrorisme « brun »

Le meurtre de Walter Lübcke a réveillé le spectre du terrorisme « brun » dans le pays. Sous-estimée dans les années 2000 par les autorités malgré les meurtres à l’époque de huit immigrés turcs, d’un Grec et d’une policière allemande par le groupuscule néonazi Nationalsozialistischer Untergrund (NSU, « Parti national-socialiste souterrain »), la menace est perçue aujourd’hui comme un défi crucial pour la sécurité intérieure.

En octobre 2019, un sympathisant d’extrême droite a failli commettre un massacre le jour de la fête juive de Yom Kippour, dans une synagogue de Halle, avant de tuer une passante et un homme dans un restaurant fréquenté par des immigrés. Il a été condamné à la perpétuité en décembre. En février 2020, un homme a également tué neuf personnes d’origine étrangère dans deux bars de Hanau, près de Francfort, avant de se suicider.

Enfin, mercredi, la justice allemande a ouvert la voie au procès d’une sympathisante d’extrême droite soupçonnée d’avoir envisagé de s’en prendre à des élus et des musulmans. En parallèle, responsables politiques allemands et survivants de l’Holocauste ont mis en garde contre la résurgence de l’antisémitisme dans le pays, à l’occasion de la Journée annuelle de commémoration des victimes du nazisme.

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Le Monde avec AFP

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