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Comment Berlin s’est converti à la politique industrielle

Par Cécile Boutelet

Publié aujourd’hui à 18h00

En élisant le centriste Armin Laschet, samedi 16 janvier, à la tête de l’Union chrétienne-démocrate (CDU), le premier parti allemand, les conservateurs ont posé un jalon important du programme économique de l’après-Merkel. S’ils avaient choisi son concurrent Friedrich Merz, plus proche des milieux d’affaires et partisan d’une approche plus libérale des questions économiques, ils auraient implicitement remis en cause les changements majeurs opérés par l’Allemagne en 2020.

A la faveur d’une conjonction unique de facteurs historiques – pandémie du Covid-19, présidence allemande de l’Union européenne (UE), fin du long mandat d’Angela Merkel, faiblesse des taux d’intérêt –, Berlin a tranché une série de débats qui la tiraillaient depuis longtemps. Tous sont liés à un constat sans appel : l’Allemagne a pris conscience de l’érosion de son modèle industriel et commercial classique, et de sa fragilité face aux Etats-Unis et à la Chine. Dès lors, comment réagir pour éviter de décrocher dans le contexte du double défi, numérique et climatique ? Ce qui amène à la question quasi philosophique du rôle de l’Etat dans un pays façonné depuis l’après-guerre par la pensée ordolibérale où l’Etat régule mais se mêle le moins possible des entreprises.

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A ces questions, l’Allemagne a livré, en 2020, plusieurs éléments de réponse inattendus. Rarement l’analyse des faiblesses du pays avait été suivie de réponses aussi rapides et d’interventions aussi massives du politique dans l’économie. En quelques mois s’est installée, dans les cercles économiques les plus influents et au sein de la CDU, l’idée qu’une « politique industrielle », impliquant une intervention forte de l’Etat, était incontournable pour moderniser l’outil industriel allemand et renforcer l’Europe, seul ensemble ayant une taille critique suffisante pour s’affirmer dans le face-à-face commercial et technologique Pékin-Washington.

Renversement du modèle dominant

C’est un renversement du modèle dominant ces dernières années dans les milieux conservateurs, qui privilégiait la neutralité de l’Etat dans l’économie, un strict équilibre des finances publiques et la confiance dans la bonne marche du libre-échange. « On peut vraiment parler d’un changement de paradigme », confirme Jens Südekum, professeur d’économie internationale à l’université de Düsseldorf. « On ne peut pas encore exclure la possibilité qu’on revienne au statu quo ante après les élections générales de septembre. Mais les chances sont fortes que ces transformations se maintiennent. »

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