France World

En Azerbaïdjan, l’autocrate Ilham Aliev rendu populaire par la guerre

Par Paul Tavignot

Publié aujourd’hui à 12h53, mis à jour à 14h53

Le président azerbaïdjanais, Ilham Aliev, 59 ans, pose en treillis devant la grande mosquée de Choucha, reconquise par son armée deux mois plus tôt, le 8 novembre 2020. Sur les photos, prises le 15 janvier 2021 à l’occasion de la première visite présidentielle dans cette ville érigée en « capitale culturelle » du pays, il est accompagné de son épouse, la première vice-présidente, Mehriban Alieva, et de leur fille aînée, Leyla, toutes deux également en tenue militaire, le visage mangé par d’énormes lunettes de soleil. Autour d’eux, personne. Excepté de lointaines sentinelles, visibles de dos. Ces images veulent montrer que le triomphe militaire émane de la personne du « commandant suprême victorieux », selon l’expression désormais employée par les médias officiels.

Les Arméniens ont été chassés de cette forteresse naturelle qu’eux nomment « Chouchi », objectif militaire et politique prioritaire du conflit qui a embrasé le Karabakh, du 27 septembre au 9 novembre 2020, au terme d’un spectaculaire assaut mené par les forces spéciales azerbaïdjanaises, à travers les falaises. « Nous avons détruit leur armée en combattant des canons et des chars avec des armes légères et des couteaux. Où étaient-ils ? Ils ont fui et se sont cachés à Erevan », dit avec exagération le président, dans un registre ubuesque destiné à la télévision d’Etat.

Lire aussi notre reportage : A Choucha, cité meurtrie du Haut-Karabakh, les forces azerbaïdjanaises sous contrôle russe

Pour louer sa « glorieuse armée », il affectionne les expressions imagées : « Notre poigne de fer leur a brisé le dos et écrasé la tête. S’ils nous provoquent, notre réponse sera très dure. Ils le regretteront avec une autre défaite amère, exulte le dirigeant. Nous avons prouvé notre force au monde entier. Nous avons forcé l’ennemi [arménien] à s’agenouiller et à signer l’acte de capitulation. »

Depuis la victoire du 9 novembre, après quarante-quatre jours de combats, le sourire ne quitte plus ses lèvres. Longtemps mal-aimé, parce qu’il avait hérité du pouvoir de son père, en 2003, et qu’il vivait dans une bulle de luxe, il savoure ce triomphe personnel patiemment élaboré. A partir de 2005, il a converti des pétrodollars azerbaïdjanais en achats massifs d’armes russes, israéliennes et turques : des drones, des blindés et des systèmes de brouillage bien plus perfectionnés que ceux dont disposaient les Arméniens.

Aliev a su exploiter les erreurs tragiques du pouvoir arménien – notamment en juillet 2020, quand le premier ministre arménien, Nikol Pachinian, a effectué un pas de danse, à Choucha, et déclaré : « Le Karabakh est arménien, un point c’est tout !  », décuplant la colère de l’opinion publique azerbaïdjanaise. Il a habilement profité de ce que l’attention mondiale avait les yeux rivés sur la campagne présidentielle américaine.

Il vous reste 86.49% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Source

L’article En Azerbaïdjan, l’autocrate Ilham Aliev rendu populaire par la guerre est apparu en premier sur zimo news.