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Au Grand-Bornand, la résignation des professionels face au « gachis » d’une saison blanche

Une poignée de lycéens, futurs pisteurs-secouristes, cassent la croûte au pied d’un télésiège dont ils sont les seuls à pouvoir profiter. En contrebas, la station du Grand-Bornand (Haute-Savoie) semble au ralenti, comme sonnée par l’annonce du gouvernement qui a quasiment sonné le glas de la saison mercredi soir.

Dans son grand manteau rouge, Stéphane Deloche dérape et s’arrête en bas de la piste. Le directeur de l’école de ski locale, « s’y attendait »: il ne pourra pas accueillir les clients en ski alpin début février, comme en a décidé mercredi le gouvernement.

« Les moniteurs, on va leur trouver une activité qui sera peut-être un dixième de ce qu’ils avaient l’occasion de faire », lâche-t-il, ski en main, se disant « résigné ».

Son collègue Renaud Laubry est un peu abattu. Son métier, d’habitude, c’est de faire tourner cette grande « station-village » de 24 remontées mécaniques et 84 km de pistes avec environ 200 pisteurs, techniciens, guichetiers et autres salariés des remontées mécaniques.

Au pied des pistes et près d’un parking presque vide, le directeur des remontées mécaniques fait part à l’AFP de sa « frustration » à ne pas pouvoir faire profiter les skieurs de ces « conditions parfaites »: il y a plus d’un mètre de neige au bas du télésiège.

Avec environ 25.000 lits touristiques, la station du massif des Aravis réalise 60 % de ses nuitées pendant les mois d’hiver – et le mois de février est le véritable pivot de cette économie de la montagne.

A l’office du tourisme, face à l’église du village, les coups de fil s’enchaînent. « Il y a ceux qui décident d’annuler leur séjour », reconnaît sa directrice Isabelle Pochat-Cottilloux, mais il y a aussi ceux qui, souhaitant maintenir leur location, demandent « quelles sont les autres activités disponibles ».

Pour l’instant, la station observe un taux d’occupation moyen de 50% pour les quatre semaines des vacances de février, et espère capitaliser sur un « panel très large d’activités » pour limiter la casse de l’absence de ski alpin.

-« On s’y attendait »-

Là où défilent d’habitude des skieurs alpins claudiquant dans leur chaussures rigides, quelques vacanciers empruntent raquettes aux pieds les rues enneigées du village. Chez Patrice et Stéphanie Angelloz-Nicoud, les 20 paires de ski de randonnée sont réservées chaque week-end.

Au fond de leur magasin, en haut de la station, les skis alpins de location prennent la poussière. « Tout le monde s’y attendait », regrette Patrice, qui confie ressentir un « grand sentiment de tristesse et de gâchis » face à la décision du gouvernement.

Et encore, « on ne sait pas de quoi va être fait février, on ne peut pas se projeter ». Pour l’instant, leur magasin tourne à « 5-10% » de l’activité habituelle, et pour l’heure ils sont seuls à gérer un magasin qui emploie normalement une dizaine de personne au pic de la saison.

Le seul embauché est en activité partielle. Un autre saisonnier a, par exemple, préféré conserver son emploi en maçonnerie. La station, 2.200 habitants à l’année, propose en temps normal près de 2.000 emplois saisonniers.

Mercredi soir, le gouvernement a jugé « hautement improbable » une réouverture mi ou fin février. « Pour nous la saison (de ski alpin) va être blanche et on espère quand-même qu’on va pouvoir accueillir les gens pour faire de la raquette, de la randonnée et qu’ils viendront passer du bon temps en montagne », espère Patrice.

Face à une casse sociale qui se profile, « il faut maintenant que l’Etat mesure toutes les conséquences (de sa décision) et prenne des engagements » pour soutenir « cet écosystème montagnard », prévient le maire André Perrillat-Amédé.

« Un euro dépensé dans le forfait des remontées mécaniques correspond à 6 euros dépensés au niveau d’une station », explique-t-il. « Nous avons d’ordinaire un chiffre d’affaire qui dépasse les 16 millions d’euros au Grand Bornand. Vous devinez un petit peu le manque à gagner qui existe actuellement » pour l’ensemble des acteurs économiques, peste-t-il.

« La station n’est pas morte, mais ça manque un peu de pep’s », résume Denise Maniere, une retraité iséroise en vacances. « On se fait une raison », assure-t-elle, mais cette skieuse de fond regrette surtout une chose: avec le couvre-feu, son « vin chaud du soir » au café du coin n’existe plus.

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