C’est le « héros du Capitole », un héros très discret, de ceux dont le destin est du genre à inspirer le cinéaste Clint Eastwood. Eugene Goodman est entré dans l’histoire, le 6 janvier : quelques heures après l’assaut des partisans de Donald Trump sur le Capitole, un plan-séquence filmé par Igor Bobic, journaliste au Huffington Post, montrait les actions de cet agent de la police du Capitole.
Seul, il ralentit les assaillants, les détourne d’une salle où les sénateurs s’étaient retranchés, tout en transmettant à ses collègues des informations sur sa position et sa destination. La vidéo se termine lorsqu’il est parvenu à conduire les émeutiers vers une autre zone où l’attendent d’autres agents. Une autre séquence, obtenue par le site d’investigation Propublica, montrait la confrontation vue du côté des assaillants.
Here’s the scary moment when protesters initially got into the building from the first floor and made their way out… https://t.co/Q7MfKCbFE3
Mais la reconnaissance publique des actions d’Eugene Goodman ne s’est pas arrêtée là. La diffusion d’une nouvelle vidéo, mercredi 10 février, au deuxième jour du deuxième procès en destitution de Donald Trump, a apporté un nouvel éclairage sur son intervention décisive. Sur l’enregistrement muet d’une caméra de surveillance, on le voit passer en trombe devant Mitt Romney, l’un des rares sénateurs républicains à avoir tenu tête à l’ancien président, lui faisant signe de rebrousser chemin alors que les manifestants, qui auraient pu le prendre à partie pour s’être opposé à leur champion, approchent.
A closer shot of Officer Eugene Goodman directing Sen. Mitt Romney to safety on Jan. 6: https://t.co/Xen8wlh0zb
Après avoir vu ces images, Mitt Romney a déclaré avoir « eu beaucoup de chance que l’agent Goodman soit là pour me mettre dans la bonne direction ». La famille de l’ancien candidat à l’élection présidentielle de 2012 ne s’y est pas trompée et l’a aussi remercié sur Twitter d’avoir sauvé la vie au sénateur.
We appreciate your bravery and service, Officer Eugene Goodman!! https://t.co/iJ21G5rDU5
Le premier fait d’armes d’Eugene Goodman lui a valu, le 20 janvier, le privilège d’escorter la vice-présidente Kamala Harris dans le Capitole, où avait lieu la cérémonie d’investiture du président Joe Biden. Il a ensuite été promu au titre de sergent d’armes du Sénat des États-Unis.
Part de mystère
Plusieurs élus, démocrates et républicains, veulent à présent aller plus loin et lui décerner la médaille d’or du Congrès pour ses actions, la plus haute distinction civile qui puisse être accordée par le Congrès des Etats-Unis, généralement à ceux qui font une action pour la sécurité ou l’intérêt national des États-Unis. En attendant, il s’est vu remettre la Distinguished Public Service Award, la plus haute distinction décernée par le secrétaire à la défense à un simple citoyen.
Bien que connu à présent à travers le pays, Eugene Goodman garde une part de mystère. De lui, on sait qu’il est né dans le sud-est de Washington, en 1980, et qu’il a 40 ou 41 ans. Deux de ses anciens professeurs ont déclaré à une chaîne de télévision de Washington qu’ils l’avaient reconnu et décrivent un élève calme, serviable et bien élevé, disponible pour désamorcer les conflits.
Après le lycée, il a servi au sein de la 101e division aéroportée, entre 2002 et 2006, a atteint le grade de sergent et a combattu en Irak, en 2005. Interrogé par le New York Times, un de ses compagnons d’armes se souvient de lui comme du chef de la « Hardrock Company », une section de dix hommes qui multipliait les patrouilles de combat à la recherche des engins explosifs improvisés dans la zone du triangle sunnite, près de Bagdad.
Crainte d’une célébrité non désirée
Un autre camarade de combat, le lieutenant-colonel Jeff Farmer, se rappelle l’avoir vu mener « nombre de patrouilles à pied en tant qu’homme de pointe », la position la plus exposée, ajoutant qu’il serait prêt, après l’avoir déjà fait en Irak, à lui confier à nouveau sa vie. Une porte-parole de son ancienne unité a également déclaré que « Goody » avait obtenu en Irak une décoration pour avoir activement participé aux combats.
Depuis les événements du 6 janvier, Eugene Goodman ne s’est pas exprimé et a demandé à ses voisins de ne pas parler aux médias. Des amis et collègues ont en effet expliqué au Washington Post qu’il a craint que cette célébrité non désirée fasse de lui la cible potentielle des groupes d’extrême droite.
Son action permet en tout cas de redorer, au moins en partie, l’image de la police du Capitole, chargée de la sécurité des élus. Après l’assaut, plusieurs de ses membres avaient en effet été suspendus et une douzaine fait actuellement l’objet d’une enquête après la publication d’images les montrant en train d’ouvrir des portes aux extrémistes ou de poser pour des selfies avec eux.
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