C’était l’une des grandes annonces de Joe Biden lors de son premier discours de politique étrangère : renouer avec une diplomatie fondée sur les « valeurs ». Les Etats-Unis vont retirer les rebelles houthistes du Yémen de leur liste de groupes terroristes. Une désignation que les organisations humanitaires jugeaient néfaste aux efforts d’aide sur le terrain. Les belligérants des deux camps ont loué les efforts de paix de Washington dans leur pays.
Le secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, a informé, vendredi 5 février, le Congrès de son intention de retirer les houthistes de la liste des groupes considérés comme terroristes par Washington, a annoncé le département d’Etat. « Nous avons formellement notifié au Congrès l’intention du secrétaire d’Etat d’annuler » cette désignation, a déclaré un porte-parole du département d’Etat. La mesure prendra effet rapidement.
Les houthistes avaient été classés parmi les groupes terroristes par l’administration du président Donald Trump et des organisations d’aide humanitaire estimaient que cette désignation entravait leur action sur le terrain.
Depuis 2014, une guerre civile sévit au Yémen. Le conflit oppose les rebelles houthistes aux forces gouvernementales, soutenues depuis 2015 par une coalition internationale menée par l’Arabie saoudite. Il a fait des dizaines de milliers de morts et des millions de déplacés, selon des organisations internationales, et provoqué la pire crise humanitaire au monde, selon l’ONU.
Conséquences humanitaires
Face à ce conflit, des organisations humanitaires ont déclaré qu’elles n’avaient pas d’autre choix que de traiter avec les houthistes, qui gouvernent de facto une grande partie du Yémen, dont la capitale, Sanaa, et que leur désignation comme terroristes les exposait au risque d’être poursuivies en justice par les Etats-Unis.
Le porte-parole du département d’Etat a précisé que la mesure annoncée vendredi se fondait uniquement sur ces considérations. « Cette décision n’a rien à voir avec ce que nous pensons des houthistes et de leur conduite répréhensible, dont des attaques contre des civils et l’enlèvement de citoyens américains », a-t-il dit.
« Nous nous sommes engagés à aider l’Arabie saoudite à défendre son territoire contre de nouvelles attaques. Notre action est due uniquement aux conséquences humanitaires de cette désignation de dernière minute de l’administration précédente, dont les Nations unies et des organisations humanitaires ont depuis dit clairement qu’elle allait accélérer la plus grave crise humanitaire au monde », a expliqué le porte-parole.
Le prédécesseur d’Antony Blinken, Mike Pompeo, avait justifié cette mesure en soulignant les liens des houthistes avec l’Iran, pays auquel le président Trump était très hostile, et en rappelant une attaque meurtrière des rebelles le 30 décembre sur l’aéroport d’Aden, la deuxième ville du Yémen.
« Cette guerre doit cesser »
La mesure annoncée vendredi intervient après un discours du président Joe Biden dans lequel il a annoncé la fin du soutien des Etats-Unis à la coalition militaire menée par l’Arabie saoudite qui combat les houthistes au Yémen. Les belligérants ont réaffirmé leur volonté de mettre fin au conflit après l’engagement de M. Biden à soutenir les « efforts diplomatiques », mais une solution apparaît toujours hors de portée à ce stade, estiment des experts.
Dans son premier discours de politique étrangère depuis qu’il a succédé à Donald Trump, Joe Biden a mis fin jeudi au soutien américain à la coalition et a appelé à renforcer les efforts diplomatiques pour mettre fin au conflit.
« Cette guerre doit cesser », a-t-il martelé, annonçant l’annulation de ventes d’armes à l’Arabie saoudite. M. Biden a confirmé la nomination d’un diplomate chevronné, Timothy Lenderking, comme émissaire des Etats-Unis pour le Yémen.
Le gouvernement yéménite, reconnu par la communauté internationale, a salué ces annonces, soulignant « l’importance de soutenir les efforts diplomatiques ». Il a salué la nomination de M. Lenderking comme une « étape importante » pour « mettre fin à la guerre causée par les houthistes soutenus par l’Iran ».
Demande de cessez-le-feu
L’Iran nie fournir des armes aux houthistes mais ne cache pas son soutien politique aux rebelles. Les houthistes ont apporté leur soutien à l’approche de la nouvelle administration américaine, qui avait fait savoir dès janvier qu’elle reconsidérerait la décision de M. Trump d’inscrire les rebelles sur sa liste des organisations terroristes.
« Nous sommes prudemment optimistes », a réagi à l’AFP Hamid Assem, un responsable houthiste. « Nos missiles ne s’arrêteront pas tant qu’il n’y aura pas de cessez-le-feu. (…) Ce sont eux qui ont commencé la guerre, ce sont eux qui doivent y mettre fin », a-t-il toutefois prévenu, se référant aux forces gouvernementales et à leurs alliés.
Sans mentionner la fin du soutien américain à la coalition, Ryad a salué « l’engagement » de M. Biden « à coopérer avec le royaume pour défendre sa souveraineté et contrer les menaces contre elle ». L’Arabie saoudite est depuis des mois la cible d’attaques répétées menées par les rebelles.
Adel al-Jubeir, ministre d’Etat saoudien aux affaires étrangères, a exprimé sur Twitter sa « hâte » de travailler avec les « amis américains pour mettre fin aux conflits ». Mais, sur le terrain, une solution apparaît quasiment impossible.
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