Publié le : 08/03/2022 – 06:53Modifié le : 08/03/2022 – 06:58
Depuis le début de l’invasion russe le 24 février, des visages féminins qui résistent sur le territoire ukrainien sont partout dans les médias. À l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes, France 24 se penche sur l’engagement exceptionnel des Ukrainiennes dans la guerre.
« Je voudrais pour commencer saluer le courage incroyable des femmes d’Ukraine qui se battent, qui sont forcées à trouver un abri pour leurs proches dans des bunkers, qui accouchent dans des stations de métro et qui mènent le combat sur la ligne de front, a déclaré Roberta Metsola, présidente du Parlement européen, dans son discours d’ouverture pour évoquer la Journée internationale des droits des femmes 2022, inévitablement tournée vers l’Ukraine cette année. Je rends hommage à leur courage, à leur force et à leur résilience dans ces circonstances particulièrement graves. »
War in #Ukraine changed people’s lives forever.
During @EP_GenderEqual I commended the incredibly brave women of 🇺🇦: fighting, sheltering loved ones in bunkers, giving birth in metro stations, leading on the frontline.
Women testament to courage, strength & resilience. #IWD2022 pic.twitter.com/HuX1zrfjFC
— Roberta Metsola (@EP_President) March 3, 2022
Des couturières qui confectionnent des gilets pare-balles et des toiles de camouflage, des mères de famille qui s’occupent de la logistique humanitaire, des étudiantes qui prennent les armes… La liste des exemples des femmes engagées dans la guerre en Ukraine est longue. « Le courage des femmes ukrainiennes est partout, bravo à elles ! », s’enthousiasme Nadia Myhal, présidente de l’association Femmes ukrainiennes en France, contactée par France 24. Mais ce courage ne surprend pas la retraitée qui vit à Paris depuis plus de 20 ans et participe à des collectes de dons et des levées de fonds par le biais de son association. « Lors de la guerre du Donbass en 2014, on avait déjà pu voir à quel point les femmes ukrainiennes étaient présentes dans le conflit. Il est donc naturel de les voir à nouveau entrer en résistance, à différents niveaux. »
Un courage forgé grâce à l’histoire du pays
Pour la bénévole et ancienne institutrice, ce courage s’explique en grande partie par l’histoire du pays. « Les récents mouvements féministes ne sont pas pour grand-chose dans la place majeure qu’occupent les Ukrainiennes dans cette guerre. Depuis le Moyen-Âge, ce pays est bouleversé par les guerres. De tous temps, depuis que les hommes sont partis se battre, les femmes ont pris l’habitude d’assumer tout et de prendre les décisions au sein de la famille mais aussi au niveau local et national. Le pouvoir des femmes fait partie depuis longtemps de la mentalité ukrainienne, au point que l’on peut presque parler d’une société matriarcale. »
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Rien d’étonnant donc à ce que les femmes composent aujourd’hui 15 % des effectifs militaires. Olena Bilozerska, lieutenant dans l’armée ukrainienne, interrogée par France 24, est l’une d’entre elles. « Je pense que dans quelques jours, je combattrai sur le front, je l’espère, parce que c’est mon pays, ma terre, je veux la défendre et c’est mon devoir de le faire. Je pense que j’ai assez d’expérience pour le faire. Je pense que tout citoyen capable de prendre les armes doit le faire et partir au combat. »
Il y a aussi celles qui se sont engagées dans la résistance armée non militaire, la Défense territoriale civile, en réponse à l’appel de la présidence ukrainienne au premier jour de la guerre. Maria, jeune habitante de Kiev de 22 ans, tout juste diplômée en relations internationales, a pris les armes dès le deuxième jour du conflit. « J’étais avec une amie dans la rue et autour de nous, c’était la panique. Les gens étaient terrorisés », explique-t-elle dans un article publié sur TV5 Monde. « Nous avons vite compris qu’il fallait faire quelque chose pour aider notre pays à retrouver sa liberté. Depuis, nous patrouillons dans les rues de Kiev, à deux ou à trois, quatre heures le jour et deux heures la nuit », relate la jeune femme dans un entretien téléphonique alors que la tension reste vive dans les faubourgs de la capitale.
« Les héroïnes du quotidien »
Quand elles ne prennent pas les armes, les Ukrainiennes tentent tout de même de se rendre utiles. Certaines sont engagées dans des réseaux de résistance en approvisionnant en vivres, matériel, fournitures médicales ou carburant des membres de la Défense territoriale civile ou des soldats. Olena Zelenska, la première dame ukrainienne, constitue l’un des visages de la résistance du pays. Elle a aussi exprimé son admiration envers les « héroïnes du quotidien » dans une lettre publiée le 1er mars sur son compte Instagram. Elle salue notamment « celles qui soignent, sauvent et nourrissent […], celles qui continuent à faire leur travail – dans les pharmacies, dans les magasins, dans les transports et dans les services publics, pour que la vie continue et change. » Elle a enfin rendu hommage à « celles qui, sans paniquer, emmènent chaque jour leurs enfants à la crèche, où on les divertit avec des jeux et des dessins animés pour que les enfants n’aient pas l’esprit de la guerre, et à celles qui accouchent sous les bombes ».
Il y a aussi celles qui ont dû fuir l’Ukraine et dont il ne faut pas oublier le courage, prévient Nadia Myhal. « Elles ont tout quitté du jour au lendemain dans des conditions extrêmes. La plupart d’entre elles n’ont pas fui le pays pour échapper à la guerre : elles ont surtout mis leurs enfants à l’abri car ce sont en grande majorité des mamans », poursuit la présidente de Femmes ukrainiennes en France, qui compte également prendre part à l’accueil des familles. Plus de 1,5 million de personnes ont fui l’Ukraine en dix jours. La moitié d’entre elles sont des enfants, selon l’ONU, qui prévoit à terme jusqu’à 4 millions de réfugiés.
Les femmes, premières victimes de la guerre
Fuir les zones de combats est aussi un moyen pour les femmes d’échapper aux viols de guerre. Le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Dmytro Kuleba, a déclaré le 4 mars que des soldats russes avaient commis des viols dans des villes ukrainiennes, a rapporté l’agence Reuters, qui précise ne pas avoir été capable de vérifier cette affirmation. Les médias locaux ukrainiens ont quant à eux signalé 11 cas de viol à Kherson, une ville désormais sous contrôle russe. « Les femmes sont toujours les plus affectées dans les conflits. Les femmes et les enfants », précise Anastasia Mikova, coréalisatrice de « Woman », interrogée dans l’émission « ActuElles » de France 24. « J’ai été amenée à travailler en Syrie et en République démocratique du Congo, et partout et de tous temps, on s’en prend au corps des femmes comme arme de guerre pour détruire une nation. »
L’ancienne miss Ukraine 2015 invite les femmes à prendre les armes
Attristée, la réalisatrice ukrainienne est tout de même fière de l’attitude des Ukrainiennes. « Les femmes font des progrès pour garantir leurs droits et il suffit souvent d’une guerre pour reculer à des années-lumière de tout ce que l’on avait pu obtenir. Mais là, les femmes ne se laissent pas abattre. Jamais je n’aurais imaginé que mes amies architectes, journalistes, professeures prennent les armes pour défendre leur pays. C’est aussi ça les femmes d’aujourd’hui, ce ne sont plus des petits êtres fragiles qui attendent. Je suis très très fière de voir les femmes ukrainiennes. »
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