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Récit« Rivaux en puissance » (4/6). En mai 1999, en pleine guerre en ex-Yougoslavie, un bombardier américain de l’OTAN lâche cinq bombes sur la représentation diplomatique chinoise en Serbie, tuant trois personnes. Erreur ou acte intentionnel ? Vingt-trois ans après, la question n’est toujours pas tranchée.
C’est ici, dans cet espace devenu aujourd’hui l’Institut Confucius de Belgrade, que l’irréparable se produisit, peu après qu’eurent sonné les douze coups d’une nuit lointaine, quand la Yougoslavie existait encore. Le 7 mai 1999, au 46e jour des bombardements déclenchés par les avions de l’OTAN pour faire plier la Serbie du régime du président Slobodan Milosevic, un bombardier américain furtif de type B-2 lâcha cinq bombes sur l’ambassade de Chine, faisant trois morts et endommageant gravement le bâtiment.
C’était le temps de la guerre au Kosovo, conflit dans lequel l’armée de l’autocrate yougoslave se livrait depuis des mois à des opérations de nettoyage ethnique contre la minorité musulmane de ce territoire – alors province de la Serbie. Pour sauver les Kosovars, l’OTAN déclencha alors l’opération « Force alliée », dont les bombardiers allaient pilonner le territoire serbe à un rythme soutenu : on dénombrera, en tout, 37 465 sorties aériennes durant les soixante-dix-huit jours que dura l’opération (du 23 mars au 10 juin), soit 480 par jour en moyenne…
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Le bombardement de l’ambassade fut-il une « erreur », comme le plaida aussitôt l’administration du président américain Bill Clinton ? Ou cet acte « barbare » , comme le dénonça sans tarder le vice-président chinois de l’époque, le futur numéro un Hu Jintao, fut-il intentionnel ?
Manifestation à Guangzhou (Canton), le 8 mai 1999, après le bombardement de l’ambassade de Chine à Belgrade. AFP
Jusqu’à ce jour, aucune réponse satisfaisante n’a été apportée à cette question. Et vingt-trois ans après les faits, le mystère reste entier à propos de l’une des crises les plus aiguës que traversa l’histoire des relations entre Washington et Pékin. De courte durée, cette crise se traduisit en effet par des manifestations antiaméricaines en Chine, avec attaques, par des étudiants ayant reçu l’appui du régime, de l’ambassade américaine à Pékin et du consulat général des Etats-Unis à Shanghaï. Dont les façades furent égratignées sous les jets de bouteilles, de pierres et de pétards…
Positions irréconciliables
A Belgrade, le seul rappel tangible de la tragédie est aujourd’hui un monument érigé devant le centre culturel chinois, dont la façade au revêtement ajouré forme les contours symboliques d’une peinture de paysage chinoise classique. A côté d’une statue du philosophe Confucius (551-479 avant J.-C.), qui donne son nom au centre, ce monument a été construit récemment en mémoire des « martyrs » – le mot est gravé dans le marbre, en serbe, en chinois et en anglais – de la tragédie. Les trois citoyens chinois – deux hommes et une femme – qui périrent dans l’explosion des bombes étaient officiellement journalistes, l’un travaillant pour l’agence de presse Chine nouvelle (Xinhua) et les deux autres, un couple, pour le journal Guanming, quotidien de l’élite du Parti communiste.
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