La finale de la Ligue des champions de football va-t-elle, pour la troisième fois d’affilée, être relocalisée ? Après deux années où le Covid-19 a contraint l’Union des associations européennes de football (UEFA) à choisir une nouvelle ville hôte pour accueillir l’ultime rencontre de la compétition qu’elle organise, la situation en Ukraine pourrait conduire l’instance organisatrice à changer de lieu pour la finale de l’édition 2021-2022.
Celle-ci doit en effet théoriquement avoir lieu samedi 28 mai, à Saint-Pétersbourg, ville natale du président de la Fédération de Russie, Vladimir Poutine. Or, l’annonce de la reconnaissance par la Russie, lundi 21 février, de l’indépendance des deux territoires séparatistes prorusses dans l’est de l’Ukraine – les républiques autoproclamées de Donetsk et de Louhansk –, a provoqué une situation de crise.
Alors que l’Union européenne a mis en œuvre, mardi, des sanctions graduelles contre le pays à la suite de l’offensive de M. Poutine en Ukraine, plusieurs voix ont appelé à priver la Russie de l’organisation de compétitions sportives. « Il n’y a aucune chance que l’on organise des tournois de football dans une Russie qui envahit des pays souverains », a ainsi déclaré le premier ministre britannique, Boris Johnson, mardi 22 février, devant le Parlement.
« Il est absolument vital en cette période critique que le président Poutine comprenne que ce qu’il fait sera un désastre pour la Russie », a ajouté le pensionnaire du 10 Downing Street, qui, en parallèle, a annoncé des sanctions contre des banques et des oligarques russes.
La ministre des affaires étrangères, Liz Truss a ajouté, mercredi, que tout club anglais qui se qualifierait pour la finale devrait boycotter celle-ci si elle devait se tenir à Saint-Pétersbourg. Le ministre des sports polonais, Kamil Bortniczuk, a lui aussi proposé de déplacer la finale de la Ligue des champions, ainsi que le championnat du monde de volley-ball, qui débute à la fin d’août. « Le sport est un vecteur très important d’émotions sociales », a-t-il assuré, mardi, sur le site d’actualité progouvernemental polonais wPolityce :
« Et si nous sanctionnions le sport, ce serait perceptible et, surtout, ressenti par la société russe. Tel devrait être le rôle des sanctions. »
Contactée par Le Monde, l’UEFA assure « suivre la situation de près ». Et si, en Angleterre, certains évoquent une possible finale au stade de Wembley, à Londres, l’instance répond que « toute décision concernant la finale de la Ligue des champions sera prise en temps voulu, si nécessaire ».
Des liens financiers forts avec le groupe russe Gazprom
Changer le lieu de la finale n’est pas insurmontable. Ces deux dernières années, l’ultime rencontre de la compétition reine en Europe a été relocalisée : à Lisbonne en 2020, puis à Porto en 2021, en lieu et place d’Istanbul.
Ces changements, dus à la pandémie de Covid-19, avaient été opérés par l’instance régissant le football européen parfois en dernière minute : en 2021, elle avait opté pour le Portugal à quinze jours de la finale, le pays ayant levé ses restrictions sanitaires, ce qui a permis de disposer d’un stade rempli de spectateurs, venus assister à la victoire de Chelsea face à Manchester City.
Outre la question du lieu d’accueil de la finale de la Ligue des champions, l’UEFA est aussi sous pression en raison des liens financiers forts qu’elle a noués avec Gazprom. Mardi soir à Londres, à quelques kilomètres du Parlement britannique où s’était exprimé Boris Johnson, les nombreux écrans du stade de Stamford Bridge se sont ainsi illuminés aux couleurs du géant gazier russe, quand l’attaquant de Chelsea, Christian Pulisic, a inscrit le second but des siens en huitièmes de finale aller de la Ligue des champions, contre Lille.
Le groupe, majoritairement contrôlé par le pouvoir russe, avait été présenté comme « l’un de nos partenaires les plus fiables » par l’UEFA
Sponsor majeur de l’UEFA depuis 2012, Gazprom a renouvelé son partenariat avec la Ligue des champions en mai 2021, l’élargissant même aux deux prochaines compétitions continentales, la Ligue des nations et le championnat d’Europe. Le groupe, majoritairement contrôlé par le pouvoir russe, avait été présenté, à cette occasion, comme « l’un [des] partenaires les plus fiables » de l’UEFA. Les liens vont d’ailleurs au-delà des « simples » contrats de marketing. Alexander Dioukov, le patron de la branche pétrolière du géant russe de l’énergie, qui est aussi le président de la Fédération russe de football, est par exemple membre du comité exécutif de l’UEFA.
Il sera bien plus ardu pour l’UEFA de se défaire de ce partenaire – qui rapporte près de 40 millions d’euros par an, selon les estimations de SportBusiness Sponsorship –, que d’abandonner la Gazprom Arena de Saint-Pétersbourg pour la finale.
Concernant son partenariat avec Gazprom, l’instance européenne répond, là aussi, qu’elle « suit la situation de près », ajoutant qu’elle n’a « pas d’autre commentaire à faire à ce sujet pour le moment ».
Mais plusieurs diffuseurs de la Ligue des champions – dont les britanniques BT Sport – ont, selon une personne proche du secteur, demandé une ligne de conduite claire quant au fait de diffuser des publicités pour Gazprom en marge des rencontres. Dont les huitièmes de finale aller, qui se poursuivent mercredi soir.
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