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« Sinomocene » ou l’investissement écrasant de la Chine au Cambodge

Par Eleonore Sok-Halkovich

Publié aujourd’hui à 06h15

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En imagesAvec son projet, le photographe Davide Monteleone montre l’impact de l’expansion chinoise sur le continent asiatique. Ses images du Cambodge, où l’Italien s’est rendu en 2019, racontent un quotidien bouleversé par une modernisation à marche forcée.

Le photographe italien Davide Monteleone a passé près de vingt ans en Russie. C’est là, à la frontière orientale, qu’il a observé les prémices de l’initiative chinoise des « nouvelles routes de la soie » annoncées par le président Xi Jinping en 2013. Un investissement pha­raonique de 1 000 milliards de dollars visant à conforter la présence de l’empire du Milieu dans le monde, au travers d’infrastructures maritimes, routières ou ferroviaires.

Mordu de géopolitique, le photographe de 48 ans, triplement récompensé du prestigieux prix World Press (2007, 2009 et 2011), s’est lancé, en 2014, dans une vaste entreprise de documentation des impacts de cette expansion. Un projet pour lequel il a obtenu une bourse du National Geography Storytelling Fellows en 2019.

Dans une extrême pauvreté

Sinomocene se présente comme une « tentative d’enquêter sur la possible représentation visuelle d’enjeux apparemment invisibles ou non photographiables de notre époque ». Davide Monteleone a ainsi travaillé sur une vision d’ensemble, s’intéressant par exemple au port de Djibouti, financé par la Chine, saisi par des images satellites. Une démarche à laquelle s’est ajoutée une approche plus classique de photoreportage, à la recherche des traces des transformations politiques, sociologiques ou environnementales à l’échelle locale.

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C’est dans cette optique qu’il s’est rendu au Cambodge fin 2019. La Chine est le premier investisseur dans ce pays à l’histoire tragique, avec en point d’orgue le règne sanguinaire des Khmers rouges de 1975 à 1979. Aujourd’hui, la deuxième puissance économique mondiale y est présente dans les secteurs de la construction, de l’industrie et du tourisme, contribuant au boom de la croissance et au développement d’une classe moyenne. Mais, si le Cambodge se modernise au son du marteau-piqueur, les inégalités demeurent, et un tiers des 16 millions d’habitants vit toujours dans une extrême pauvreté.

« Ce néocolonialisme est possible dans des Etats à la gouvernance peu transparente, ce qui pose des risques d’ingérence politique. » David Monteleone

« Ce qui m’a frappé à mon arrivée à Phnom Penh, la capitale, c’est le nombre de tours en chantier », témoigne Davide Monteleone. A Sihanoukville, cité côtière qui sera bientôt reliée à Phnom Penh par une nouvelle autoroute de 190 kilomètres financée par la Chine à hauteur de 1,9 milliard de dollars, il photographie la champignonnière de casinos et de complexes hôteliers destinés aux touristes chinois. Néons tapageurs, bitume éventré, poussière sur les mantilles vertes des façades… Les Cambodgiens sont partagés entre la fièvre des opportunités et la peur d’être phagocytés par le puissant dragon.

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