La joueuse chinoise de tennis Peng Shuai, dont la situation personnelle inquiète le monde depuis qu’elle a accusé, à l’automne 2021, un haut dirigeant du régime de Pékin de l’avoir violée, a donné un entretien au journal L’Equipe – le premier dans un média international depuis novembre – mis en ligne dimanche 6 février. Dans cette interview, la sportive de 36 ans affirme qu’elle n’a « jamais disparu ».
Dans une longue lettre publiée le 2 novembre sur Weibo, Peng Shuai avait accusé Zhang Gaoli de l’avoir violée en 2014, époque où il était numéro 7 du régime chinois. Son témoignage avait vité été effacé des réseaux sociaux et son compte fermé, puis elle n’avait plus donné signe de vie, jusqu’à un entretien en visioconférence avec le président du Comité international olympique (CIO) Thomas Bach, le 21 novembre.
« Simplement, beaucoup de gens, comme mes amis du CIO, m’ont envoyé des messages, et il était tout à fait impossible de répondre à tant de messages, explique-t-elle à L’Equipe. Mais, avec mes amis proches, je suis toujours restée en contact étroit, j’ai discuté avec eux, répondu à leurs e-mails, j’ai aussi discuté avec la WTA [Association des joueuses de tennis]… »
Interrogée sur les faits qui ont amené cette affaire et « l’agression sexuelle » subie, Peng Shuai dément, tout comme elle revient sur son message posté sur un réseau social, message qui a vite disparu. « Agression sexuelle ? Je n’ai jamais dit que quiconque m’avait fait subir une quelconque agression sexuelle », insiste-t-elle. Pourquoi le message accusateur a-t-il été effacé ? « Parce que j’en avais envie », répond-elle.
Vêtue d’un survêtement rouge et noir, Peng Shuai, 36 ans, « est apparue en bonne forme » selon les journalistes qui l’ont rencontrée.
Dîner avec le président du CIO
Interrogée sur sa vie depuis novembre, Peng Shuai explique qu’elle « est comme elle doit être : rien de spécial… » « Je voudrais tout d’abord que l’on comprenne bien qui je suis : je suis une fille tout à fait normale. Parfois je suis sereine, parfois je suis contente, parfois je me sens triste, ou encore je peux me sentir très stressée, soumise à une très forte pression… Toutes les émotions et réactions normales qui habitent les femmes, je les vis et les ressens aussi », poursuit-elle.
Elle raconte avoir rencontré Thomas Bach samedi dernier, en marge des Jeux olympiques de Pékin. Lors de ce dîner, « nous avons pu beaucoup discuter et échanger agréablement », explique la joueuse de tennis. « Il m’a demandé si j’envisageais de revenir à la compétition, quels étaient mes projets, ce que je pensais faire, etc. », explique Peng Shuai, interviewée par les deux journalistes de L’Equipe dans un hôtel situé dans la bulle olympique.
Jeudi, deux jours avant la rencontre entre Thomas Bach et Peng Shuai, le CIO avait affirmé qu’il la « soutiendrait » si elle devait réclamer l’ouverture d’une enquête concernant les accusations de rapport sexuel forcé.
« Si elle veut une enquête, bien sûr, nous la soutiendrons, mais cela doit être sa décision, c’est sa vie, ce sont ses accusations. Nous avons eu les accusations et nous avons entendu aussi le retrait » de ces accusations, a déclaré le président du CIO lors d’une conférence de presse la veille de la cérémonie d’ouverture des JO 2022.
Elle met un terme à sa carrière
Le CIO a confirmé dans un communiqué que son président, accompagné de l’ancienne nageuse Kirsty Coventry, membre de l’institution, avait rencontré la joueuse, en précisant que la Chinoise allait assister à plusieurs épreuves des JO 2022 après avoir déjà suivi une rencontre du tournoi de double mixte de curling. « Tous trois ont décidé que toute communication ultérieure sur le contenu de la rencontre serait laissée à la discrétion de la joueuse de tennis », a précisé le CIO qui l’a de nouveau invitée à se rendre au siège de l’instance olympique à Lausanne (Suisse).
Dans l’entretien à L’Equipe, Peng Shuai annonce par ailleurs qu’elle met un terme à sa carrière professionnelle, sauf peut-être « dans une équipe vétéran ».
« Le tennis a transformé ma vie, m’a apporté de la joie, des défis et tant de choses encore. Même si je ne participe plus à des compétitions professionnelles, je serai pour toujours une joueuse de tennis. »
Depuis le début de l’affaire, la joueuse était simplement apparue sur des vidéos la montrant en train d’assister à des événements sportifs, sans dissiper les craintes quant à sa pleine liberté de mouvement.
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