Plus de 220 personnes ont été blessées, mercredi 27 janvier, dans de violents heurts à Tripoli entre policiers et manifestants sortis pour la troisième soirée consécutive, dans cette ville du nord du Liban, afin de protester contre les restrictions sanitaires et une crise économique qui ne cesse de s’approfondir.
Selon l’agence nationale d’information, 226 personnes ont été blessées : 102 ont été soignées ou transportées vers les hôpitaux de la ville par la Croix-Rouge libanaise et 124 autres par les secouristes de l’Association médicale islamique. Au total, 66 personnes ont été hospitalisées. Sur Twitter, les forces de l’ordre ont fait état de neuf blessés dans leurs rangs, dont un officier dans un état grave.
Les affrontements ont commencé dans l’après-midi lorsque les protestataires ont jeté des cocktails molotov et des pierres sur les forces de l’ordre qui ont répliqué par des tirs de gaz lacrymogène, selon une correspondante de l’Agence France-Presse (AFP) sur place.
« Il est temps que les gens descendent dans la rue »
Des manifestants en colère ont tenté ensuite de pénétrer à l’intérieur du Sérail, le siège du gouvernorat du Nord, tandis que d’autres se sont rassemblés sur la place Al-Nour, l’un des lieux phares des manifestations monstres qu’avait connues le Liban à l’automne 2019 contre la classe dirigeante sur l’ensemble de son territoire.
En soirée, des tirs à balles réelles d’origine inconnue ont été entendus dans le secteur du site de la manifestation par la correspondante de l’AFP, tandis que des protestataires ont mis le feu à l’entrée d’un bâtiment de la police.
« Nous sommes ici pour demander de la nourriture, les gens ont faim », a lancé Mohamad Ezzedine, un manifestant de 20 ans. « Il est temps que les gens descendent dans la rue », a-t-il ajouté. « Nous avons pris la décision de poursuivre notre action, quel que soit le prix (…) car nous n’avons plus rien à perdre », a renchéri un manifestant encagoulé. « Nous vivons dans des conditions misérables. J’ai frappé à toutes les portes, mais n’ai trouvé aucun emploi », a ajouté ce chômeur de 25 ans.
Après plusieurs heures de heurts, les forces de l’ordre et l’armée libanaise ont déployé des renforts autour du Sérail et sur la place Al-Nour pour disperser les manifestants et les empêcher de prendre d’assaut le siège du gouvernorat. Les manifestants se sont retranchés dans les ruelles adjacentes où les affrontements se sont poursuivis tard dans la soirée.
Mardi soir déjà, des heurts entre manifestants d’une part et forces de l’ordre et militaires d’autre part avaient fait 45 blessés, contre 30 la veille, selon la Croix-Rouge libanaise.
De nombreux habitants sans revenus
Tripoli était déjà l’une des villes les plus pauvres du Liban avant la flambée du nouveau coronavirus et les confinements décrétés par les autorités en près d’un an, qui ont aggravé les conditions de vie de ses habitants. De nombreux habitants de cette cité, notamment des journaliers, se sont retrouvés sans revenus depuis le début du dernier confinement.
Outre la situation sanitaire, le Liban est englué dans sa plus grave crise économique depuis la fin de la guerre civile (1975-1990) avec une dépréciation historique de sa monnaie, une hyperinflation et des licenciements massifs. La moitié de la population vit désormais dans la pauvreté, face à une classe dirigeante accusée d’être aux abonnés absents.
Jusqu’ici limité à la seule ville de Tripoli, le mouvement de protestation contre le confinement s’est étendu mardi et mercredi soir, des manifestants bloquant certains axes routiers dans d’autres régions.
Dans la capitale Beyrouth, des protestataires ont incendié des pneus devant un mur séparant la place Riad el-Solh, dans le centre-ville, du Parlement, tandis que d’autres ont bloqué la route de la cité sportive à l’aide de bennes d’ordures et de pneus enflammés, a indiqué l’agence nationale de l’information.
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