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Les pistolets connectés à la conquête du marché américain

Des pistolets connectés, qui ne répondent qu’à des personnes identifiées au préalable, pourraient être commercialisés cette année aux Etats-Unis, où les législateurs sont dans l’impasse sur la régulation des armes à feu.

L’intérêt d’intégrer des puces électroniques à certaines armes, et la fiabilité de celles-ci, font débat depuis des années. L’objectif serait d’empêcher les enfants, les criminels et les personnes suicidaires d’appuyer sur la gâchette.

Mais rien ne prouve à ce stade que les adeptes de l’autodéfense armée ne soient prêts à les adopter, ni que ces pistolets dits « intelligents » ne fonctionnent aussi bien que promis.

« Je n’ai pas de boule de cristal pour savoir si ça va être plutôt positif, plutôt négatif ou au final le même échec que pour d’autres pistolets connectés dans le passé », remarque Adam Skaggs, un conseiller juridique chez Giffords, une association de régulation des armes à feu.

Le patron de l’entreprise SmartGunz Tom Holland avec l’une de ses armes connectée, dans le Kansas (SMARTGUNZ, LLC/AFP – -)

L’entreprise SmartGunz a eu recours à des puces RFID (radio frequency identification), comme celles qui sont utilisées dans les badges pour les péages électroniques, par exemple. L’utilisateur doit porter un anneau connecté pour pouvoir tirer.

Tom Holland, le patron, vise les officiers de police qui craignent qu’une personne appréhendée ne retourne leur arme contre eux, ou les parents inquiets à l’idée que leurs enfants ne trouvent leur pistolet.

« Les gens qui veulent une arme plus +sûre+ peuvent faire ce choix s’ils estiment qu’ils ont besoin d’une protection létale chez eux », explique-t-il.

Ses produits sont déjà testés par des unités de police dans le pays, et il espère les commercialiser au public au printemps.

– Empreinte digitale –

Quelques 40% des adultes américains vivent dans un foyer où se trouve des armes à feu, estime le cabinet Pew Research Center.

Près de 23 millions d’unités ont été vendues en 2020, un record, selon Small Arms Analytics & Forecasting, qui table sur 20 millions pour 2021.

La pandémie et les manifestations contre la discrimination raciale ont contribué à une forte augmentation des homicides en 2020, même si les niveaux sont restés inférieurs aux pics des années 1990.

Et les tragédies américaines dans les écoles ou lieux publics font régulièrement les gros titres, mais plus de la moitié des 40.000 morts causées chaque année par des armes à feu sont des suicides.

Ginger Chandler, la cofondatrice du fabricant LodeStar Works, voit dans les systèmes d’authentification une barrière physique mais aussi psychologique aux incidents.

« Dans un moment de stress, la personne autorisée va se saisir de l’arme mais il y aura cette étape supplémentaire », note-t-elle. « Peut-être que cela leur donnera le temps de se dire, ‘est-ce que je veux vraiment faire ça?’ ».

Sa société compte commercialiser en 2023 un 9 mm qui peut être activé via une application mobile, directement avec un code secret ou encore par reconnaissance biométrique de l’empreinte digitale.

– Plus « intelligentes » mais toujours mortelles –

Les entreprises ne pourront sans doute pas compter sur les législateurs pour faire adopter leurs nouveaux engins. Le sujet divise les électeurs au point d’empêcher toute évolution des lois.

En 2000, le fabricant américain Smith & Wesson et le gouvernement de Bill Clinton s’étaient mis d’accord pour que les pistolets connectés fassent partie de réformes en vue de réduire la violence, mais le projet n’a pas tenu, face à l’opposition du puissant lobby des armes à feu.

De même, en 2002, une loi de l’Etat du New Jersey, qui aurait interdit les pistolets sans mécanisme d’authentification, avait suscité l’indignation. Elle n’a jamais été réellement appliquée, la technologie n’étant pas prête.

Cette loi a finalement été transformée en 2019 en une simple obligation pour les armureries d’Etat de vendre ces armes de nouvelle génération quand elles seront commercialisées.

L’épisode de l’échec du fabricant allemand Armatix n’a pas aidé cette technologie non plus: en 2017, un hacker a contourné leur système d’identification avec des aimants.

Surtout, le concept ne fait pas même l’unanimité chez les partisans de la régulation des armes à feu.

Car connectées ou pas, ces armes restent mortelles. Et « peu de propriétaires à risque ou de familles vont acheter ces pistolets plus chers que les autres. Ils vont surtout plaire à ceux qui se souciaient déjà de la sécurité », souligne Daniel Webster, chercheur spécialiste du sujet à l’université Johns Hopkins.

Gareth Glaser, le cofondateur de LodeStar, ne veut pas se mêler aux débats politiques: « on préfère que le gouvernement ne s’en mêle pas et laisse le consommateur choisir ».

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