C’est devenu une litanie quasi quotidienne. Chaque matin, les réseaux sociaux russes font le compte des dernières perquisitions, des affaires criminelles ouvertes et, désormais, des départs du pays. De plus en plus nombreux, ceux-ci ne concernent plus seulement les partisans de l’opposant Alexeï Navalny. Blogueurs, politiques, défenseurs des droits de l’homme, rappeurs, journalistes, avocats, scientifiques… des dizaines de personnalités ont choisi ces derniers mois l’exil pour des motifs politiques.
L’identité du dernier partant a soulevé une émotion inhabituelle, en ce début d’année. C’est par un message publié sur Facebook le 10 janvier que Viktor Chenderovitch, 63 ans, vedette du petit écran et humoriste réputé, a annoncé qu’il quittait son pays natal pour une destination encore inconnue. « La Russie de Poutine m’a indiqué ma place : près des chiottes, dans les geôles nationales », écrit-il, dénonçant vingt ans de pressions, de menaces et de surveillance policière.
Avec son départ, c’est une page de l’histoire russe qui se referme : dans l’esprit de millions de Russes, le nom de Viktor Chenderovitch reste associé à celui des « koukli », émission de télévisée emblématique des années 1990 mettant en scène des marionnettes à l’effigie de personnalités politiques russes. Le programme satirique n’avait pas survécu longtemps à l’arrivée au pouvoir de Vladimir Poutine, qui y apparaissait en « méchant petit nain » : dès 2001, la chaîne NTV avait été fermée par les autorités, et ce programme directement inspiré des « Guignols de l’info » arrêté dans la foulée.
Dans le viseur du « cuisinier de Poutine »
Depuis, il était devenu un écrivain prolifique – auteur d’une trentaine de pièces, nouvelles, romans et recueils de poésie – et un commentateur acerbe, notamment pour la radio Echo de Moscou, de la scène politique russe. Il ne cachait pas son soutien à l’opposition à Vladimir Poutine. Fin décembre 2021, il avait été désigné par la justice russe « agent de l’étranger », une désignation infamante impliquant des contraintes administratives importantes.
L’auteur, habitué des tribunaux, a expliqué fuir de nouvelles poursuites judiciaires, intentées cette fois par l’oligarque Evgueni Prigojine, pour diffamation. « Je me suis toujours présenté aux convocations en justice ou à des interrogatoires. En partie par curiosité, en partie par confiance dans le destin et dans cette croyance acquise dans l’enfance – dans le triomphe, sinon du bien, du moins du bon sens. (…) Cette fois je m’abstiens, justement au nom du bon sens. »
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