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Le monde en 2022: l’argent coule à flots en Europe

Les gouvernements se bagarreront autour du PSC

Cette fois-ci, la réponse a été plus avisée. Dès l’apparition du Covid-19, la BCE a lancé un nouveau cycle d’achat d’obligations et l’UE a suspendu le fonctionnement habituel de ses règles budgétaires, le fameux Pacte de stabilité et de croissance (PSC), en autorisant les gouvernements à dépenser librement pour financer le chômage partiel et les autres dispositifs de soutien.

L’année qui vient montrera dans quelle mesure les choses ont changé. Au premier semestre de 2022, les gouvernements de l’UE se bagarreront autour du PSC, la référence budgétaire de l’UE. Même avant le Covid-19 les contraintes du PSC, définies dans les années 1990, apparaissaient mal adaptées à un monde de taux d’intérêts faibles et de besoins pressants d’investissement. Une pléthore d’amendements avaient accouché d’une jungle juridique où seuls les experts pouvaient se retrouver. Aujourd’hui des pays comme l’Italie enregistrent un endettement proche de 160% du PIB. Les règles existantes, qui doivent être rétablies en 2023, obligeraient théoriquement la péninsule à dégager des excédents budgétaires primaires de 5 points de pourcentage par an – une forme d’austérité punitive qui défie le sens commun.

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Les procédures législatives ne s’activeront pas assez vite

Mais, entre les gouvernements, la réforme du SGP continue à susciter des désaccords. Pas question pour l’instant de réviser les traités européens afin d’amender les chiffres repères du Pacte, qui limitent les déficits budgétaires publics et l’encours de la dette de l’Etat respectivement à 3% et 60% du PIB. Les pays qui voudraient des changements dans ce domaine, comme la France et l’Italie, chercheront à faire adopter des modifications juridiques facilitant par exemple la voie vers l’ajustement des pays endettés – peut-être en donnant aux gouvernements la possibilité de la définir eux-mêmes. Afin de pouvoir atteindre les objectifs climatiques Fit for 55, certains gouvernements pousseront à l’adoption d’une « règle d’or » qui exclurait les dépenses vertes du calcul du déficit.

Les lourdes procédures législatives de l’UE ne s’activeront pas suffisamment à temps pour que les règles soient modifiées en 2023. D’ici là les gouvernements devront attendre que Bruxelles leur dise si les budgets proposés sont jugés acceptables. La Commission, elle, devra s’assurer que les pays nordiques ne pousseront pas des cris d’orfraie au cas où elle se montrerait coulante avec ceux qui ne respectent pas les règles. Certains ont d’ores et déjà fait savoir qu’ils resteraient inflexibles. Et la nouvelle coalition allemande ne sera certainement pas disposée à s’aligner avec l’Europe du Sud.

Le débat se déroulera alors qu’un certain nombre de risques planeront sur la reprise, avec notamment la poursuite de la désorganisation des chaînes d’approvisionnement, des désordres auxquels des pays ayant des secteurs manufacturiers importants, comme l’Allemagne, sont particulièrement vulnérables. Les restrictions pesant sur les voyages et les contacts du fait de la pandémie pourraient elles aussi freiner la croissance. Et la BCE mettre un terme à un certain nombre de ses mesures de relance en 2022.

Débat autour du remboursement de la dette

Le dispositif Next Generation UE (NGEU), le plan d’investissement de 800 milliards d’euros de l’UE financé par de la dette, allègera une partie de la pression. En 2022, la Commission déboursera environ 55 milliards de subventions, dont des montants particulièrement importants à destination de l’Espagne et de l’Italie. D’autres versements sont prévus pour 2023 et 2024.

Pour rembourser leurs dettes, les gouvernements envisageront d’accroître les « ressources propres » (taxes communes) de l’Union européenne, peut-être au travers de prélèvements sur les importations en provenance de pays qui n’ont pas instauré un prix du carbone, ou en amendant le dispositif d’échange de quotas d’émissions de l’UE. Mais l’unanimité requise pour procéder à ce genre de changements s’est souvent révélée très difficile à atteindre. Ce débat débutera sérieusement en 2022.

Une autre discussion s’ouvrira. Bruxelles a longtemps eu du mal à réagir face à des Etats membres comme la Pologne et la Hongrie dont elle estime qu’ils sapent l’ordre juridique de l’Union européenne. En 2022, elle fera monter les enjeux en suspendant le versement des fonds du fameux Plan, voire ceux du budget régulier de l’UE. Cela irritera les gouvernements qui voient les eurocrates de Bruxelles comme des tyrans et inquiétera les dirigeants soucieux de l’unité de l’UE. Mais cela rassurera les contribuables des autres pays qui pourront constater que leur argent ne contribue pas à miner le club de l’intérieur.

Challenges publie une version non exhaustive du World Ahead 2022 de The Economist
 

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