Branle-bas de combat au sommet de l’Etat. Ce lundi 3 janvier, le Premier ministre Jean Castex a réuni à Matignon dix ministres pour faire le point sur la continuité des services publics et la rentrée scolaire, perturbées par l’explosion inédite du nombre de contaminations (167.000 par jour en moyenne sur les sept derniers jours) et de « cas contact ». Ce matin, le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, a décidé que le remboursement des prêts garantis par l’Etat (PGE) aux entreprises, pourrait être davantage étalé. Une facilité qui s’ajoute aux mesures déjà annoncées hier pour aider les secteurs les plus impactés par la résurgence de l’épidémie (restauration, tourisme, évènementiel…). Après presque deux ans de crise, malgré le succès des vaccins, le Covid vient à nouveau jouer les trouble-fête et menace de mettre à bas tout un pan de l’économie.
« Coup de massue psychologique »
Alors que l’Hexagone approchait du pic de la cinquième vague liée au variant Delta, une nouvelle épidémie dans l’épidémie s’est, en effet, déclenchée avec l’apparition du variant Omicron. Rien que sur les sept derniers jours, près de 2% de la population a été touchée, du jamais vu. Ultra-contagieux, il se distingue par sa capacité à infecter des personnes déjà contaminées par les anciennes souches du virus et les 78% de Français vaccinés (92% de vaccinés chez les plus de 12 ans). La plupart de ses « victimes » étant partiellement immunisées, il semble certes provoquer bien moins de formes graves. Mais l’impact sanitaire combiné d’une plus grande transmissibilité et d’une moindre sévérité reste encore incertain. Les premières données britanniques et françaises suggèrent une hausse encore contenue des hospitalisations conventionnelles et une stabilisation des entrées en soins critiques. Or, c’est bien la saturation des services de réanimation, aujourd’hui encombrées par des cas de variant Delta, qui a auparavant poussé le gouvernement à confiner le pays.
Il espère aujourd’hui que le tsunami refluera rapidement, comme en Afrique du Sud, et se refuse à prendre des mesures plus restrictives afin de préserver l’économie. Pour 2022, Bercy table ainsi sur une croissance robuste de 4%, après un rebond de 6,7% en 2021. Cette prévision s’appuie sur la bonne dynamique engagée à l’été: avec une hausse du PIB de 3% au troisième trimestre, la France a réalisé la deuxième meilleure performance de l’OCDE et presque rattrapé son niveau d’activité d’avant crise, devançant même l’Allemagne. Ce bel élan risque désormais de se heurter au mur Omicron. « Les deux derniers confinements étaient plus pénalisants pour l’activité mais avaient été davantage anticipés, décrypte l’économiste Mathieu Plane, de l’OFCE. Ce choc est plus inattendu, c’est un coup de massue psychologique, qui renforce l’incertitude à moyen terme. » Même s’il n’est pas question de fermer les commerces, cette incertitude pourrait peser sur le moral des ménages et les dépenses de consommation.
Une croissance revue à la baisse
Surtout, l’économie est confrontée à un choc d’offre inédit, la multiplication des contaminations et des « cas contact » risquant d’empêcher une partie des gens de travailler. L’économiste de Natixis, Patrick Artus, s’est ainsi livré à un rapide calcul sur la base du scénario médian de l’Institut Pasteur, avec un pic à 300.000 infections par jour. En tenant compte des « cas contact » et de la proportion de télétravail possible, 4,3 millions de personnes pourraient être empêchées de travailler du fait de leur quarantaine. Soit 14% de la population active et donc une perte de PIB équivalente! C’est pourquoi les conditions d’isolement viennent d’être allégées, en permettant aux « cas contact » vaccinés de ne pas s’isoler si leurs tests sont négatifs. « Cela devrait permettre de réduire largement le choc, estime Patrick Artus. La perte de PIB serait de l’ordre de 2 points sur le mois de janvier et de 0,7 point sur le premier trimestre. » La France retrouverait dès lors une croissance négative puisque l’Insee escomptait, hors impact du variant, une progression de seulement 0,4%.
Le choc Omicron pourrait également fragiliser les chaînes de production internationales et provoquer des difficultés d’approvisionnement, alors que les goulots d’étranglement de ces derniers mois avaient tendance à se résorber. « La stratégie zéro covid de la Chine, qui bloque certains de ses ports ou sites industriels, va générer des frictions », s’inquiète Denis Ferrand, de l’Institut COE Rexecode. De quoi aggraver les tensions inflationnistes actuelles -la hausse des prix a atteint 2,8% en décembre- et peser sur le pouvoir d’achat des ménages. Dans ces conditions, la prévision officielle de croissance pour 2022 fait désormais figure d’hypothèse haute. Patrick Artus table plutôt sur 3 à 3,5%. Dans ses prévisions du 20 décembre, la Banque de France évoque même un scénario noir dans lequel le gouvernement serait contraint de prendre des mesures de restriction semblables à celles de fin 2020-début 2021. La croissance annuelle retomberait alors à 2,2%.
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