Alors qu’un redoux exceptionnel enveloppe la France, les stations de ski des Vosges ferment une à une leurs pistes et, pressées par le réchauffement climatique, repensent leur offre touristique.
Pluie fine, mercure à 7°, trois pistes ouvertes sur la vingtaine qui s’échelonnent de 1.000 à 1.260 m d’altitude : en ce jeudi matin, la station du Schnepfenried, sur le versant alsacien des Vosges, a fortement réduit la voilure, après une première semaine de vacances de Noël enneigée et plutôt réussie.
En cause, l’étonnant redoux qui gagne la France, dernière illustration du réchauffement climatique et n’a pas épargné l’Est, où les températures sont « proches des records », selon Météo France.
Plusieurs stations vosgiennes ont baissé temporairement le rideau. Au « Schnep », les températures exceptionnellement douces ont réduit la neige à une peau de chagrin, mettant l’herbe de la montagne à nu.
A l’entrée de la station, des enfants et quelques adultes débutants glissent sur la piste verte tandis qu’à quelques centaines de mètres de là, au bord de la rouge, une douzaine d’employés s’affairent pour reconstituer une piste pour le tire-fesses.
– Noëls verts –
Au volant de son tracteur, le gérant du Schnepfenried, Nicolas Buhl, puise dans un tas de neige en réserve dont il déverse de larges portions sur la piste, aussitôt aplaties à grands coups de pelles par ses salariés.
« Au début des vacances, on a eu un bon enneigement » mais les conditions sont ensuite devenues « très particulières, avec beaucoup de pluie, du vent », affectant la fréquentation et le chiffre d’affaires de cette station où plus de quarante personnes travaillent l’hiver, poursuit M. Buhl.
L’objectif désormais est « de maintenir l’activité » jusqu’à la fin des congés de Noël même s’il se veut rassurant pour la suite de la saison hivernale : avec encore « un peu de neige » et « les quantités qu’on a en stock, ce sera possible de faire une saison très correcte ».
« C’est la première fois que nous venons ici », explique Mirjam Stevens, Néerlandaise de 34 ans, en Alsace avec son mari et ses deux enfant de 11 mois et 4 ans. « C’est un peu décevant, on voit l’herbe verte de la montagne au lieu de la neige », glisse la jeune femme, « inquiète » des effets du réchauffement climatique.
Les Vosges sont soumises à une « variabilité naturelle très importante », et les Noëls verts, sans flocons, y alternent régulièrement avec des hivers plus enneigés, nuance Bruno Vermot-Desroches, référent neige pour le massif à Météo France.
Mais le réchauffement climatique vient aggraver cette situation, avec un enneigement qui, globalement, « diminue », explique-t-il.
Dans une étude publiée début 2020, Météo France prévoyait ainsi en moyenne montagne, « à l’horizon 2050 (…), une réduction de la durée d’enneigement de plusieurs semaines et de l’épaisseur moyenne hivernale de 10 à 40% ».
Les stations des Vosges sont donc en première ligne face à ces dérèglements. Certaines, comme celle de Ventron, l’an passé, ont même définitivement fermé, victime du manque de neige.
Conscientes des enjeux, elles réfléchissent à des sources de revenus alternatives le reste de l’année pour pérenniser leurs activités et être moins dépendantes de la saison hivernale, épine dorsale de leur modèle économique.
– « Alternatives » –
« C’est une chose (à laquelle) on a réfléchi depuis plusieurs saisons » et le « +quatre saisons+, c’est ce qui est souhaité », explique Nicolas Buhl. En 2013, la station a ouvert un parcours accrobranche et un « grand projet » de « restructuration d’hôtel » pour muscler l’offre d’hébergement est en réflexion.
« L’avenir, c’est le +quatre saisons+, c’est clair », confirme Valérie Lanoë, chargée de communication à l’office de tourisme de Gérardmer, ville qui accueille l’une des plus importantes stations du massif.
« Des activités estivales ont été ouvertes » cet été dans la station (locations de trottinettes, de vélos électriques ou de swincars…), poursuit Mme Lanoë. Une première pour la « perle des Vosges » qui regardait traditionnellement l’été vers son lac.
« L’idée, c’est de s’ouvrir à d’autres activités génératrices de ressources mais peu gourmandes en frais de fonctionnement », avance Cyril Braesch, directeur du syndicat mixte de la vallée de Munster, dont dépend le Schnepfenried.
Les Vosges connaîtront sans doute encore « de beaux hivers », prédit Bruno Vermot-Desroches. Mais la problématique qui va se poser aux stations, c’est celle de « l’investissement et du retour sur investissement », résume-t-il. « Il faudra trouver des alternatives au tout-ski, sans forcément l’exclure ».
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