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Afrique du Sud : la justice suspend l’exploration sismique de Shell

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Manifestation contre le projet de la compagnie pétrolière Shell de mener des études sismiques sous-marines le long de la côte sud-est de l’Afrique du Sud, à Muizenberg Beach, au Cap, le 5 décembre 2021. RODGER BOSCH / AFP

Une onde de choc toutes les dix secondes dans l’océan : un projet du géant Shell pour rechercher pétrole et gaz au large de l’une des plus belles côtes d’Afrique du Sud a été suspendu mardi 28 décembre par la justice, une victoire inédite pour les militants écologiques.

Ouverte sur l’océan Indien au sud-est du pays, la Wild Coast, aux paysages sauvages spectaculaires, s’étend sur quelque 300 kilomètres et compte plusieurs réserves naturelles et zones marines protégées.

C’est là, sur plus de 6 000 km2, que le géant de l’énergie avait décidé de lancer un nouveau projet d’exploration sismique. Militants écologistes, pêcheurs et locaux s’y sont opposés, affirmant qu’il représente une menace pour la faune marine.

Des milliers de défenseurs de l’océan et d’amoureux de la nature ont manifesté courant décembre sur différentes plages du pays et bloqué des stations essence Shell, appelant au boycott.

« Lien spirituel avec l’océan »

Au début du mois, la justice du pays avait rejeté un premier recours des militants écologistes. Le ministre de l’énergie avait défendu le projet, accusant ses détracteurs de faire barrage aux investissements économiques dont l’Afrique du Sud a besoin.

Cette fois, dans ce nouveau recours impliquant la communauté vivant dans ce coin de nature jusqu’ici préservé, le tribunal de Grahamstown a « interdit d’entreprendre des opérations de prospection sismique » à la multinationale anglo-néerlandaise, avec effet immédiat, selon le jugement dont l’AFP a obtenu copie.

Le juge Gerald Bloem a estimé que l’entreprise n’avait pas rempli l’obligation de consulter la population locale, qui détient notamment des droits de pêche et entretient un « lien spirituel et culturel particulier avec l’océan ».

« Nous respectons la décision du tribunal et avons suspendu l’étude pendant que nous examinons le jugement », a déclaré à l’AFP un porte-parole de Shell, qui n’a pas précisé si l’entreprise ferait appel.

« Immense victoire »

La prospection offshore d’énergies fossiles utilise l’analyse de la propagation d’ondes sismiques pour déterminer la structure géologique des sols susceptibles de contenir des hydrocarbures. Les ondes de choc sont envoyées par des bateaux équipés de canons à air.

« Des études de cette nature sont menées depuis plus de cinquante ans, avec plus de quinze ans de recherches scientifiques approfondies », a argumenté le porte-parole de Shell.

« L’Afrique du Sud est fortement dépendante des importations pour une grande partie de ses besoins énergétiques. Si des ressources viables étaient découvertes en mer, cela pourrait contribuer de manière significative à la sécurité énergétique du pays », a-t-il fait valoir.

Selon les écologistes, ces détonations risquent de perturber le comportement de la faune, son alimentation, sa reproduction ainsi que les migrations, notamment celle des baleines, la plupart des animaux marins s’appuyant sur l’audition.

« Des lobbies incroyablement forts »

« La voix de ceux qui sont directement affectés a enfin été entendue et les droits constitutionnels des peuples autochtones ont été reconnus », s’est félicité dans un communiqué Sinegugu Zukulu, du collectif de résidents Sustaining the Wild Coast (SWC), qui rassemble propriétaires terriens, pêcheurs et chefs traditionnels.

« C’est une immense victoire », a salué Katherine Robinson, de l’ONG Natural Justice, qui était partie civile dans le premier recours en justice contre le projet.

« Si nous voulons lutter contre le changement climatique, nous devons résister à l’exploitation du pétrole et du gaz en Afrique du Sud et sur tout le continent, même si les lobbies sont incroyablement forts », a-t-elle insisté.

Le projet de Shell devait s’étendre sur cinq mois sans interruption. Les recherches impliquaient l’envoi d’une puissante onde de choc toutes les dix secondes, 24 heures sur 24.

Shell avait assuré prendre toutes les précautions pour « éviter ou minimiser l’impact sur les poissons, mammifères marins et autres espèces sauvages », dans la zone de recherche située à plus de 20 kilomètres de la côte dans des eaux profondes de 700 à 3 000 mètres.

Le Monde avec AFP

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