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En Argentine, des dîners entre amis au monde politique, une passion croissante pour l’astrologie

LETTRE DE BUENOS AIRES

La candidate aux législatives argentines, Victoria Tolosa Paz défend l’astrologie sur le plateau de la chaîne télévisée America Vivo, le 7 septembre 2021. YOUTUBE / AMERICA VIVO

En déclinant son signe et son ascendant, on pensait déjà avoir montré patte blanche. Mais la voilà, l’autre question, posée sur l’air de qui tente de percer les secrets de votre âme : « O.K., mais quel est ton signe lunaire ? » En Argentine, aux dîners entre amis, lors d’une première rencontre ou d’un échange fortuit, dès que les récits personnels laissent apparaître les ressorts singuliers de chacun, il est commun que l’astrologie affleure, charriant un sous-texte décrypté bien au-delà des initiés. Une anecdote peut être ponctuée d’un navré « Et oui, je sais, je suis Poissons ! » ou enrichie d’un aparté informatif – « Il est Verseau. Mais sa Lune est en Gémeaux » –, tandis qu’un convive bienveillant aura averti, en guise d’entrée en matière : « Il va falloir être patient avec soi-même, la Lune entre en Scorpion ! »

L’offre de livres, de séminaires, de cours en ligne, de pages Intagram qui étudient l’influence supposée des astres sur la vie humaine est foisonnante. En cette fin d’année, avec l’incertitude qui domine pour 2022, dans un contexte toujours aussi marqué par la pandémie due au coronavirus, les médias généralistes aussi publient des articles consacrés au sujet. « Quels sont les mouvements planétaires qui marqueront le climat astrologique ? », titre ainsi le quotidien Clarin (« la quadrature de Saturne avec Uranus continuera d’agir (…), avec des événements significatifs en juin et octobre 2022 »).

Selon la dernière enquête du Conseil national des recherches scientifiques et techniques (Conicet, 2019), en dix ans, la croyance dans l’astrologie a progressé de sept points, pour concerner un tiers des Argentins. Les trois quarts de la population croient en « l’énergie », un concept présent dans l’astrologie, soit une percée de douze points en dix ans environ.

Signe de la prégnance de cette culture : lors d’une interview télévisée en août 2020, le président Alberto Fernandez (centre gauche) rapporte qu’il a réalisé son thème astral. Conclusion : il est « destiné à bâtir sur les cendres ». Les nouvelles contaminations liées au coronavirus vont alors crescendo, dans un pays à l’économie moribonde.

« Les pays aussi ont leur thème astral »

Un an plus tard, au mois de septembre, en pleine campagne, avant les élections législatives du 14 novembre, la candidate du parti présidentiel Victoria Tolosa Paz (elle a été élue députée) raconte, lors d’un entretien télévisé, que son père « interprète le thème astral de beaucoup de monde ». Et de compléter : « C’est tout à fait incroyable, parce que (…) les pays aussi ont leur thème astral. L’Argentine est Cancer. » Sa date de naissance repose sur l’indépendance du pays, le 9 juillet 1816, soutient-elle. Des déclarations immédiatement raillées par l’opposition : « Arrêtez de regarder les étoiles et regardez les dégâts que vous faites », a tweeté le député Mario Negri (droite). C’est la même opposition de droite qui, au sein du gouvernement de Buenos Aires, avait fait appel à une astrologue, en 2018, selon les médias argentins.

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