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En Ecosse, les victimes des chasses aux sorcières bientôt officiellement innocentées

Neuf femmes sont brûlées pour sorcellerie sur une berge de Dumfries, en Ecosse (13 avril 1659). MARY EVANS PICTURE LIBRARY / PHOTONONSTOP

Elles furent accusées de gâcher les récoltes, de se changer en animaux pour commettre leurs méfaits, voire de danser avec le diable. En Europe, entre le XVIe et le XVIIIe siècle, des milliers de femmes et, plus rarement, d’hommes ont été jugés pour sorcellerie. De façon quasi systématique, ces procès aboutissaient à une condamnation à mort. Les historiens parlent de 200 000 procès en sorcellerie et de 50 000 à 100 000 femmes brûlées.

En Ecosse, la chasse aux sorcières a été particulièrement virulente. Selon un article de CityLab, publié en octobre 2019, le nombre de personnes accusées de sorcellerie y est « quatre à cinq fois supérieur à la moyenne européenne ». Aujourd’hui, près de trois siècles après l’abrogation du Witchcraft Act (loi sur la sorcellerie), en 1736, des militants sont sur le point d’obtenir des excuses officielles au nom des quelque 3 837 personnes – dont 84 % des femmes – jugées pour sorcellerie. On estime qu’environ deux tiers d’entre elles ont péri sur le bûcher.

Aveux obtenus sous la torture

Le Sunday Times rapporte qu’après une campagne de deux ans menée par le groupe des Sorcières d’Ecosse, un projet de loi visant à innocenter les accusés a été déposé au Parlement écossais et a obtenu le soutien du gouvernement dirigé par la première ministre Nicola Sturgeon. « Il est juste que ce tort soit réparé, que ces personnes qui ont été criminalisées, pour la plupart des femmes, soient pardonnées », a commenté la députée Natalie Don, à l’origine de ce texte, qui devrait être voté d’ici l’été 2022.

En 2001, une initiative similaire a permis à la Chambre des représentants du Massachusetts, aux Etats-Unis, de proclamer l’innocence des victimes des procès des sorcières de Salem. Entre 1692 et 1693, cette série de procès a entraîné l’arrestation d’une centaine de personnes ainsi que l’exécution de quatorze femmes et de six hommes.

En Ecosse, les procès de sorcellerie commencèrent après le vote du Witchcraft Act, en 1563. Avant cette date, quelques jugements sont attestés, mais ils sont rares. La première chasse aux sorcières débuta en 1590. Le roi d’Ecosse Jacques VI, qui deviendra par la suite Jacques Ier d’Angleterre, se rendit en bateau à Copenhague pour rencontrer sa future épouse, la princesse Anne, la sœur du roi du Danemark. Au retour, le navire fut pris dans une tempête. On accusa différentes personnes d’avoir tenté de faire sombrer le navire du roi. Finalement, plus d’une centaine de supposées sorcières furent arrêtées à North Berwick, une ville portuaire du nord-est de l’Ecosse. Beaucoup avouèrent sous la torture avoir rencontré le diable et cherché à tuer le roi. Environ 70 personnes furent jugées.

Jacques VI s’est particulièrement intéressé à la question. Il a même rédigé un traité, Daemonologie, en 1597, dans lequel il encourage la chasse aux sorcières :

« L’inquiétante abondance, dans notre pays, à notre époque, de ces détestables esclaves du diable, les sorcières et les enchanteurs, m’incite à vous écrire cette note (…) pour éliminer le doute (…) que de telles attaques de Satan sont assurément pratiquées, et que ses instruments méritent la punition la plus sévère. »

Au fil du temps, l’intérêt du roi pour le sujet s’est étiolé. Malgré tout, plusieurs grandes séries de procès se sont déroulées pendant le reste de son règne et bien après.

Le Guardian cite d’autres cas bien connus de procès en sorcellerie. Celui de Lilias Adie, par exemple, accusée notamment d’avoir jeté un sort à un voisin pour lui provoquer la gueule de bois. Condamnée à mort, elle succombe en prison en 1704. Issobell Young, elle, a été jugée, étranglée puis brûlée sur le bûcher en 1629. Un garçon d’écurie l’avait accusée de s’être transformée en hibou et d’avoir participé à des sabbats.

Le site des Sorcières d’Ecosse souligne que les attributs traditionnellement associés aux sorcières – balais, chaudrons, chats noirs et chapeaux noirs pointus – étaient également donnés aux alewives, le nom des femmes qui brassaient de la bière. Le balai servait à informer les consommateurs que de la bière était en vente, le chaudron à la fabriquer, le chat à éloigner les souris et le chapeau à les distinguer au marché.

Le Monde

Source

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