Des contrôles sur d’autres réacteurs nucléaires français « pourraient s’avérer nécessaires », a jugé jeudi l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), après la décision d’EDF d’arrêter une centrale des Ardennes pour vérification, une décision qui va encore réduire la production nucléaire cette année.
EDF a annoncé mercredi soir avoir décidé d’arrêter les deux réacteurs de Chooz « par mesure de précaution », et de prolonger l’arrêt des deux réacteurs de la centrale de Civaux (Vienne), après la détection de défauts à proximité de soudures des tuyauteries du circuit d’injection de sécurité de celle-ci, un circuit qui permet de refroidir le réacteur en cas d’accident.
Chooz et Civaux sont des réacteurs de la même génération – la plus récente – et de même puissance (1.450 MW).
« Des actions de contrôle pourraient s’avérer nécessaires sur les autres réacteurs en exploitation », a estimé dans une note l’IRSN, le bras technique de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), le gendarme du secteur.
« Une fois les causes du phénomène comprises, il faudrait regarder si d’autres réacteurs peuvent être concernés », a pour sa part indiqué l’ASN à l’AFP.
EDF, qui produira moins que prévu cette année, a vu sa cotation suspendue jeudi après-midi à la Bourse de Paris alors que le titre chutait de façon spectaculaire, de 16%.
L’électricien compte 56 réacteurs répartis sur 18 sites en France. Pour l’instant, les 52 autres que ceux de Chooz et Civaux ne sont pas concernés par des arrêts pour contrôles ou remplacement de matériel.
« L’IRSN estime que la décision d’EDF de mettre à l’arrêt les deux réacteurs de Chooz B, en plus des deux réacteurs de Civaux, est satisfaisante du point de vue de la sûreté », juge par ailleurs l’institut.
« Les contrôles sur les réacteurs de Chooz B permettront de déterminer s’ils sont affectés par les mêmes défauts. Des investigations approfondies doivent être menées afin de déterminer les phénomènes à l’origine des fissures de corrosion sous contrainte et définir le périmètre des contrôles à réaliser », indique l’IRSN.
– Hiver sous vigilance –
L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a de son côté jugé, dans une note distincte, que la décision d’EDF d’arrêter prochainement les réacteurs de Chooz était « appropriée à la situation ».
La centrale nucléaire de Civaux en avril 2016 (AFP/Archives – GUILLAUME SOUVANT)
Elle « suit avec attention les investigations menées par EDF et les conclusions qui en seront tirées, notamment vis-à-vis du suivi en service sur ces équipements », poursuit-elle.
L’ASN « autorise les interventions sur les équipements concernés et se prononcera sur leur remise en service », conclut-elle.
EDF avait expliqué mercredi avoir décidé du « remplacement des pièces concernées » à Civaux. L’arrêt des deux réacteurs de Chooz, prévu jeudi et samedi, doit permettre de contrôler s’ils sont concernés par le même défaut.
Avant même la révélation de ces problèmes, le gestionnaire du réseau électrique RTE prévoyait un hiver sous « vigilance particulière » en matière de sécurité d’alimentation pour la France, notamment en janvier et février en cas de vague de froid importante.
Le pays dépend à près de 70% de l’atome pour produire son électricité, et la crise sanitaire a affecté le calendrier de maintenance des centrales.
RTE évaluait jeudi l’éventuel impact des annonces d’EDF sur ses prévisions.
L’EPR de Flamanville en août 2019 (AFP/Archives – Lou BENOIST)
EDF a de son côté indiqué jeudi avoir « effectué des ré-optimisations du planning d’arrêt nucléaire, pour améliorer la disponibilité cet hiver » : par exemple, les arrêts de Flamanville 1 et 2 ont été reculés de quatre semaines pour accroître de 2 GW la disponibilité du parc sur février.
« Nous pouvons également compter sur une bonne disponibilité du parc hydraulique », ajoute l’électricien.
Le ministère de la Transition écologique a assuré jeudi « veiller en permanence à ce que toutes les dispositions soient prises pour assurer la sécurité d’approvisionnement ».
La ministre Barbara Pompili doit recevoir vendredi matin le PDG d’EDF Jean-Bernard Levy, « pour une réunion consacrée à la disponibilité du parc nucléaire et à la sécurité d’approvisionnement cet hiver ».
Selon la ministre de l’Industrie, fin novembre, 30% du parc nucléaire français était à l’arrêt. Agnès Pannier-Runacher avait suggéré de « relever notre niveau d’exigence pour la disponibilité du parc », estimant que « nous pouvons collectivement faire mieux ».
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