[La France pourrait devenir le refuge en Europe des criminels de guerre syriens. Saisie sur le cas d’Abdulhamid C., membre des services secrets de Damas interpellé en région parisienne et mis en examen en février 2019 pour « complicité de crimes contre l’humanité », la chambre criminelle de la Cour de cassation a estimé, le 24 novembre, que les tribunaux français sont incompétents au motif que le droit syrien ne sanctionne pas spécifiquement les crimes contre l’humanité. Cet arrêt interprète de façon étroite et restrictive la loi du 9 août 2010 qui transpose le statut de Rome fondant la Cour pénale internationale (CPI) et la notion de compétence universelle dans la législation française. La France est l’un des seuls pays européens à imposer ce verrou de la « double incrimination ».]
Tribune. Les atrocités commises en Syrie depuis mars 2011 ne sont pas seulement une tragédie humaine à l’origine de souffrances indicibles pour le peuple syrien. Elles choquent profondément la conscience de l’humanité dans son ensemble et portent atteinte à ses valeurs universelles.
Une décision rendue par la Cour de cassation le 24 novembre va rendre plus difficile, voire impossible, la poursuite par les juridictions françaises de certains des crimes fondamentaux commis en Syrie et bloquer l’accès à la justice de survivants et de familles de victimes de ces crimes.
Le gouvernement syrien a la responsabilité première d’enquêter sur les crimes de guerre, crimes contre l’humanité, le génocide commis sur son territoire, et de faire en sorte que les auteurs de ces crimes, quelles que soient leurs affiliations, soient jugés. Il ne s’engage pas sur cette voie.
De son côté, depuis l’utilisation des veto russe et chinois en 2014 bloquant le renvoi de la situation syrienne à la CPI, le Conseil de sécurité est toujours dans l’impasse.
De nombreuses enquêtes
A ce jour, des juridictions majoritairement européennes, y compris en France, sont les seuls espoirs tangibles de justice pour les survivants et les familles de victimes de ces crimes.
Elles obtiennent des résultats. Ainsi, début 2021, le tribunal allemand de Coblence a reconnu un ancien responsable du renseignement syrien, coupable de complicité de crimes contre l’humanité pour avoir arrêté des manifestants qui ont ensuite été détenus, torturés et pour certains tués dans l’une des nombreuses branches des services de renseignement syriens.
Il s’agit du premier jugement qualifiant les actions du régime syrien d’« attaque systématique contre sa population civile en vue d’éliminer les manifestations pacifiques et d’intimider la population afin d’empêcher de futures manifestations ».
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