L’Ukraine reviendra à la Russie, un jour. Vladimir Poutine en est convaincu. Le président russe ne supporte pas l’indépendance de son grand voisin du sud. Dans un article publié en juillet, il écrit : « Russie, Ukraine, un même peuple. » Les inquiétantes gesticulations militaires russes le long de l’Est ukrainien doivent être appréciées à l’aune des convictions ainsi affichées. Et pas autrement.
Poutine a marqué des points. Le déploiement de ses forces en bordure de la région ukrainienne du Donbass, que contrôlent des sécessionnistes affidés à Moscou, a payé. Joe Biden a concédé à son homologue russe l’ouverture d’un débat sur ses griefs concernant l’Ukraine. Le président américain propose qu’on en parle entre les Etats-Unis et quatre autres pays de l’OTAN, d’un côté, la Russie, de l’autre. La position de départ du Kremlin est connue : la non-appartenance de l’Ukraine à l’OTAN doit faire l’objet de « garanties » écrites et contraignantes. C’est une « ligne rouge » que Poutine veut en noir sur blanc.
Dans un « mémorandum » adopté à Bucarest en 2008, l’OTAN reconnaît la vocation de la Géorgie et de l’Ukraine à appartenir un jour à l’organisation. Elle ne fixe cependant aucun calendrier ni n’a ouvert, depuis, la moindre procédure d’adhésion. L’Allemagne et la France sont opposées à cet élargissement et les décisions se prennent à l’unanimité. Mais le Kremlin accuse l’OTAN, notamment les Etats-Unis et la Turquie, de surarmer l’Ukraine de façon menaçante pour la Russie. Il y aurait « otanisation » rampante.
Récit contestable
Poutine est fidèle à la démarche stratégique qu’il poursuit depuis 2000. Il entend revenir sur ce que les Russes ont concédé aux Occidentaux au lendemain de la guerre froide, « quand nous étions faibles », dit-il en substance. A tout le moins, il s’agit d’empêcher une extension de l’Alliance atlantique à l’Ukraine, ce pays intimement proche de la Russie par l’histoire, la religion, la culture, la langue et tant de liens familiaux. En jargon « kremlinien », on parle d’arrêter « la tentative d’endiguement de la Russie par le collectif occidental » – lequel « collectif » est accusé d’avoir renié sa promesse post-guerre froide de ne pas élargir l’OTAN.
Le problème avec ce récit est qu’il est pour le moins contestable. Fin mai 1990, alors que ni l’URSS ni son alliance militaire, le pacte de Varsovie, ne sont encore dissoutes, le président Mikhaïl Gorbatchev est en visite d’Etat aux Etats-Unis. Son hôte, George H. W. Bush, défend l’idée que l’Allemagne, alors en voie de réunification, doit rester dans l’OTAN. L’Américain se réfère aux principes arrêtés lors des accords d’Helsinki en 1975 qui codifiaient les relations entre l’Est et l’Ouest : un pays est libre du choix de ses alliances. Le lendemain, lors d’une conférence de presse commune avec Gorbatchev, Bush déclare : « Nous sommes pleinement en accord l’un et l’autre pour dire que, conformément à l’Acte final d’Helsinki, la question des alliances [de l’Allemagne] relève des Allemands. » Qui veulent rester dans l’OTAN.
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