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En Serbie, un projet de mine de lithium porté par Rio Tinto fait face à une fronde inédite

Les toits, fenêtres et tout autre élément de valeur ont été retirés par les anciens habitants des maisons abandonnées sur le futur site de la mine Rio Tinto à Gornje Nedeljice, en Serbie, le 11 décembre 2021. MARKO RISOVIC POUR «LE MONDE»

C’est comme si les habitants étaient tous partis subitement, mais en prenant tout de même le soin d’emmener leurs tuiles et leur charpente avec eux. Avec ses maisons creuses, sans toiture et sans fenêtre, entourées de ruban rouge et blanc et de messages de Rio Tinto avertissant qu’il est « interdit d’y pénétrer », Gornje Nedeljice est un étrange village fantôme, tout juste animé par les patrouilles de surveillance du groupe minier anglo-australien. D’ici à 2026, Rio Tinto rêve de construire sur ces terres perdues du sud-ouest de la Serbie, à la frontière bosnienne, la plus grande mine de lithium d’Europe.

Sur son site Internet, Rio Tinto assure que sa « mine Jadar », du nom de la rivière locale, sera capable d’extraire « 58 000 tonnes de carbonate de lithium par an » depuis la « jadarite », un minerai que le géant minier a découvert dans cette vallée en 2004. Soit assez « pour fournir plus d’un million de voitures électriques » à toute l’industrie automobile européenne et de faire de la Serbie « un hub pour l’énergie verte » d’un continent qui doit pour l’instant opérer sa transition vers l’électrique grâce à du lithium venant d’Australie ou d’Amérique latine. Du moins si la multinationale arrive à surpasser une résistance jamais vue jusqu’ici pour un projet minier en Serbie.

« Rio Tinto n’ouvrira jamais de mine ici », proclame Marjana Petkovic, depuis son salon installé à quelques centaines de mètres du village fantôme. Cette enseignante de 47 ans est devenue en quelques mois un des visages les plus visibles de la contestation contre le projet. Associé à des ONG environnementales de tout le pays et soutenu par l’opposition, leur mouvement « Ne donnons pas Jadar » a réussi à organiser des manifestations dans toutes les grandes villes. Samedi 11 décembre, ils étaient encore plusieurs milliers même si la mobilisation a montré des signes d’essoufflement après que le président serbe Aleksandar Vucic a promis de faire réexaminer deux lois accusées de favoriser Rio Tinto.

« J’ai peur pour les nappes phréatiques, que plus rien ne puisse pousser ici. Rio Tinto va peut-être employer mille personnes, mais des milliers d’autres vont perdre leurs emplois dans l’agriculture », estime la militante qui guette chaque animal mort dans le Jadar en suspectant les premiers forages exploratoires du groupe minier, marqués par des piézomètres bleus plantés dans les champs. Pour l’instant, difficile de savoir à quel point ces craintes sont justifiées. Rio Tinto ne publie aucune de ses études préliminaires et l’étude d’impact environnemental qui devra être approuvée par les autorités serbes est toujours en cours.

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