Publié le : 09/12/2021 – 19:47
La date butoir fixée par la Commission européenne pour régler le contentieux sur les licences de pêche entre la France et le Royaume-Uni a été rejetée, jeudi, par les Britanniques. Une décision qui suscite de nouvelles tensions.
L’escalade se poursuit au niveau européen : le Royaume-Uni a rejeté, jeudi 9 décembre, l’échéance fixée à vendredi par la Commission européenne pour régler le litige des licences de pêche post-Brexit avec la France, qui accuse Londres de mauvaise foi et promet d’aller au contentieux.
« Nous n’avons jamais fixé de date butoir », a déclaré jeudi soir le porte-parole du Premier ministre britannique, Boris Johnson, « ils en ont fixé une, mais ce n’est pas celle sur laquelle nous travaillons ».
« Travailler simplement de bonne foi avec nous »
Commentaire du président français, Emmanuel Macron, quelques minutes plus tard, sur l’ensemble des sujets de désaccord avec Londres (pêche, migrants, défense) : « J’ai terriblement envie d’avoir un gouvernement qui souhaite travailler simplement de bonne foi avec nous », a-t-il dit en conférence de presse.
Plus tôt dans la journée, la ministre française de la Mer avait prévenu que si toutes les licences de pêche encore réclamées n’étaient pas accordées d’ici vendredi soir, la France demanderait un arbitrage au niveau européen et irait « au contentieux ».
Onze mois après l’accord de commerce post-Brexit et alors que des négociations marathon se poursuivent, la France avait protesté de la « mollesse » de la Commission européenne et obtenu qu’elle donne une date butoir à Londres, fixée au « 10 décembre ».
La patience des pêcheurs français a atteint ses limites, a redit, jeudi, la ministre française de la Mer, Annick Girardin, lors d’une audition au Sénat.
Elle a promis de demander, faute de licences d’ici vendredi soir, la réunion du conseil de partenariat, censé garantir l’application de l’accord post-Brexit.
« C’est là aussi que peuvent se décider des sanctions », a-t-elle précisé, ajoutant : « C’est la Commission qui portera le contentieux et les mesures de rétorsion si elles devaient être mises en application ».
La France a obtenu 1 004 licences de pêche post-Brexit et en « attend encore 104 », selon le ministère de la Mer.
« Liste rouge »
En vertu de l’accord signé fin 2020 entre Londres et Bruxelles, les pêcheurs européens peuvent continuer à travailler dans les eaux britanniques à condition de pouvoir prouver qu’ils y pêchaient auparavant. Mais Français et Britanniques se disputent sur la nature et l’ampleur des justificatifs à fournir.
Tout en saluant à nouveau le travail constructif mené avec l’île anglo-normande de Guernesey, qui a délivré début décembre une quarantaine de licences, la ministre a déploré les « manœuvres dilatoires » du Royaume-Uni au cours des onze mois écoulés depuis la signature de l’accord.
C’est dans la zone des 6-12 milles britanniques que manque désormais le plus grand nombre de licences françaises.
Les discussions sont aussi tendues avec Jersey, qui accorde ses licences au compte-gouttes, ce qui « entretient la tension », selon Annick Girardin. Paris attend encore 51 licences définitives du gouvernement de Saint-Hélier, dont en priorité celles demandées pour la dizaine de pêcheurs classés en « liste rouge », qui n’ont plus aucun accès aux eaux de Jersey alors que leur activité en dépend très largement.
Modalités de pêche et quotas
La ministre est longuement revenue sur les onze derniers mois, n’épargnant pas la Commission européenne : « il a fallu que le président de la République se fâche », a-t-elle rappelé, tout en estimant qu’à la veille de la date butoir fixée par Bruxelles, la France et la Commission étaient « totalement sur la même ligne ».
Dans ce dossier de la pêche, le ton est déjà monté, frôlant la confrontation à plusieurs reprises : un blocus de Jersey par les pêcheurs français en mai dernier, qui avait entraîné l’envoi de deux patrouilleurs britanniques ; une inflation des menaces françaises de sanctions en octobre ; et plus récemment, le blocage par les pêcheurs français de ports et du terminal fret du tunnel sous la Manche, par lequel transitent 25 % des échanges commerciaux entre le Royaume-Uni et l’Europe.
Au-delà de la question des licences, celle des modalités de pêche et des quotas s’annonce aussi très dure. Les pêcheurs français, qui sont prêts à de nouvelles actions, seront particulièrement attentifs à la réunion des ministres européens de l’Agriculture et de la pêche, qui doivent négocier, dimanche et lundi, à Bruxelles, des quotas de pêches pour 2022.
Avec AFP
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