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A Lashkar Gah, les craintes et le désespoir des infirmières afghanes

LETTRE DE KABOUL

Une employée de MSF tient dans ses bras un enfant souffrant de grande malnutrition, à l’hôpital MSF de Lashkar Gah (Afghanistan), le 7 novembre 2021. WILLIAM DANIELS POUR « LE MONDE »

En ce début du mois de novembre, presque trois mois après la chute de Kaboul aux mains des talibans, de nombreuses villes afghanes, à l’instar de Lashkar Gah, portent encore les cicatrices de la guerre. Cette capitale de la province du Helmand (sud) a été, pendant de longues années, au centre des combats entre les nouveaux maîtres du pays et l’armée de l’ancien régime.

Dans cette ville, de nombreuses vitres brisées n’ont toujours pas été remplacées. Murs, anciens checkpoints, grandes statues placées au centre des principales places de la ville sont encore criblés de balles. Dans l’hôpital Boost, soutenu par l’ONG française Médecins sans frontières (MSF), certaines pièces portent toujours les stigmates des combats. En août, à cause des hostilités, l’infirmière afghane Habiba a été bloquée dans l’hôpital, jusqu’à ce que Lashkar Gah tombe aux mains des talibans. « A chaque fois que les combats devenaient intenses, on descendait dans le sous-sol. Depuis, la guerre est finie, mais nous avons peur, parce qu’avec les talibans, être femme pose problème, même s’ils disent que nous, les femmes, pouvons toujours travailler dans le secteur de la santé », explique cette jeune infirmière portant un foulard vert.

Quand bien même les talibans n’ont pas encore interdit la sortie des femmes seules sans un membre masculin de leur famille (la règle pendant leur premier règne, entre 1996 et 2001), Habiba, comme beaucoup d’autres de ses collègues, n’ose plus s’aventurer seule dehors. « J’ai tout simplement peur », explique-t-elle. Voilà pourquoi cette femme célibataire de 25 ans vient au travail avec cinq ou six autres collègues féminines dans un rickshaw. Elle a d’autant plus peur qu’elle entend que, dans certaines provinces, les talibans obligent les femmes célibataires à se marier avec leurs combattants. Une rumeur qui court depuis l’été.

« Tant mieux que je n’aie pas eu d’enfant ! »

Vahida, une autre infirmière, âgée de 26 ans, est, elle, mariée, sans enfant. « Ces jours-ci, contrairement à avant, je me dis : “Tant mieux que je n’aie pas eu d’enfant !” parce que les gens sont devenus très pauvres, misérables. Il n’y a pas de travail et beaucoup n’ont même pas de pain pour manger le soir », se désole la jeune femme qui arbore un foulard rose. Depuis le retour des talibans au pouvoir, l’économie afghane est en quasi-faillite, notamment à cause du blocage des réserves de la banque centrale afghane aux Etats-Unis et du gel d’une grande partie des aides internationales, dont dépend profondément Kaboul.

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