Après plus d’un an et demi de fermeture du marché saoudien due à la pandémie de Covid-19, l’industriel libanais Ziad Bekdache, spécialisé dans le papier, s’apprêtait à envoyer sa première livraison en Arabie saoudite, quand la nouvelle est tombée comme un couperet. Le 29 octobre, Riyad a rappelé son ambassadeur et interdit les importations en provenance du Liban pour protester contre les critiques du ministre de l’information, Georges Kordahi, contre la guerre au Yémen.
Les monarchies du Golfe, sunnites, mettent ainsi sous pression le pays du Cèdre pour qu’il s’extraie de la mainmise du parti chiite Hezbollah, soutien de la rébellion houthiste au Yémen. Victime collatérale de ce bras de fer, M. Bekdache s’est retrouvé avec 50 000 dollars de cahiers sur les bras, une cargaison toujours entreposée dans l’usine Oriental Paper Products à Roumieh, dans la banlieue de Beyrouth.
« Le problème entre le Golfe et le Liban est politique. J’étais étonné que l’Arabie saoudite et Bahreïn interdisent les importations. C’est punir une majorité de la population pour les actions d’une minorité », déplore M. Bekdache, dont l’Arabie saoudite est le plus gros client à l’export. D’autres industriels se retrouvent, eux, avec des containers bloqués dans des ports saoudiens, à l’instar de Georges Nasraoui, le PDG de la Sonaco, qui détient la marque d’épicerie fine libanaise Arabiya. « C’est un petit montant – 200 000 dollars [177 000 euros] –, mais des collègues ont, eux, pour 1,5 million de marchandises bloquées », dit-il.
L’effet pourrait être dévastateur
Même au pic des restrictions liées au Covid-19, le marché saoudien était resté l’un de leurs principaux débouchés. Selon l’Association des industriels libanais, 1 milliard de dollars d’exportations industrielles ont été réalisés vers le Golfe en 2020, sur un total de 2,3 milliards de dollars d’exportations, et l’Arabie saoudite a représenté, à elle seule, 217 millions de dollars. « L’ambition était de repasser à 500 millions de dollars d’exportations industrielles vers Riyad en 2022-2023 », indique Nicolas Chammas, président de l’Association des commerçants de Beyrouth.
Les industriels misaient sur l’avantage comparatif induit par l’effondrement de la livre libanaise face au dollar, et la baisse consécutive des coûts de production, pour gagner des parts de marché. Désormais, ils redoutent que les Emirats arabes unis et le Koweït, qui se sont contentés de rappeler leurs ambassadeurs, décrètent les mêmes interdictions. L’effet pourrait être dévastateur pour l’économie libanaise, déjà en plein marasme. Avec la chute du tourisme et des investissements, les transferts d’argent des expatriés et les exportations sont les principales sources d’approvisionnement en dollars.
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