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ReportageDans une enquête en deux volets, « Le Monde » raconte la ruée vers le lithium, indispensable à la fabrication des voitures électriques. Deuxième partie : le lac intérieur du sud de la Californie recèle d’importantes ressources de lithium pour lesquelles les candidats à l’exploitation se bousculent.
A 69 mètres sous le niveau de la mer, la Salton Sea fait figure de nouvelle frontière américaine du lithium. En fait de « mer », il s’agit d’un immense lac intérieur d’eau salée, au sud-est de la Californie. Un étrange no man’s land, entre Palms Springs, la capitale mondiale du golf – 130 parcours d’un vert de bocage normand au milieu du désert – et Brawley, à 40 km de la frontière mexicaine, une bourgade d’ouvriers agricoles comptant 85 % de Latinos. En 1896, les premiers settlers ont donné à la région le nom d’« Imperial Valley ». Leurs descendants en ont fait un potager qui alimente toute l’Amérique en laitues, asperges et melons. Aujourd’hui, la Salton Sea est l’une des terres promises de la lutte pour le climat: elle recèle d’imposantes ressources de lithium, le métal indispensable à la fabrication des voitures électriques.
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Les pieds dans la caillasse, Jim Turner fait le tour du propriétaire au lieu-dit Hell’s Kitchen, une butte qui domine le littoral cerné de limon blanc. Le chantier du groupe énergétique Controlled Thermal Resources a commencé le 15 novembre. Un premier puits qui va descendre à 2 430 mètres de profondeur et sera opérationnel en 2022. La terre est labourée de tranchées. Des silex apparaissent. La poussière ne demande qu’à profiter du vent pour répandre les particules toxiques qui donnent à l’Imperial Valley l’un des taux de maladies respiratoires les plus élevés du pays.
Le long de la route CA 111, au nord de la Salton Sea, à Coachella (Californie), le 26 octobre 2021. OLIVIER TOURON / DIVERGENCE POUR « LE MONDE »
Le ciel bleu est parcouru de plumes d’une blancheur immaculée : c’est la vapeur qui s’échappe des 11 centrales géothermiques (49,9 mégawatts) construites depuis 1982. La Salton Sea abrite le réservoir d’énergie géothermale le plus important des Etats-Unis. La faille sismique de San Andreas, qui traverse la Californie sur 1 200 km, s’y arrête, près d’une ancienne station balnéaire aujourd’hui fantôme, Bombay Beach, où une communauté d’artistes du désert organise chaque année une « Biennale » aux œuvres éphémères faites d’épaves et d’objets rongés par le sel.
Centrale géothermique, au sud de la Salton Sea, à Imperial Valley (Californie), le 27 octobre 2021. Au second plan, les cultures agricoles qui alimentent une partie de l’Amérique. OLIVIER TOURON / DIVERGENCE POUR « LE MONDE »
Hell’s Kitchen, la cuisine de l’enfer, doit son nom à un aventurier nommé Charles Davis, qui y avait ouvert un saloon dans les années 1920, à une époque où les geysers étaient encore en activité. Trente ans plus tard, la « mer » était devenue la « riviera du désert » pour les célébrités d’Hollywood. Il y avait des marinas, des hôtels chics, des cormorans, des pélicans. Aujourd’hui, on ose à peine s’approcher de l’eau, gardée par des panneaux : « Interdit de pénétrer ». Les pas s’enfoncent dans la « playa », le résidu issu de l’assèchement du lac.
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