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En Italie, la flambée des prix du gaz frappe durement les verriers de Murano

Chez le fabricant de produits d’art verrier Gambero & Tagliapietra, à Murano (Italie), le 18 mai 2020. ANDREA PATTARO/AFP

Le maître artisan sort la boule de verre incandescent des flammes à l’aide d’une canne, puis la roule dans de la poudre d’or. « Une fois refroidie, cette pièce fera partie d’un lustre », explique Andrea della Valentina. Son entreprise, Seguso, produit des pièces décoratives en verre sur l’île de Murano, près de Venise, depuis des générations. « Mais, aujourd’hui, tout est menacé », se désole-t-il en observant les fours, dont la chaleur envahit l’atelier par vagues. « Ils fonctionnent au méthane, toute autre source d’énergie est interdite pour des raisons de sécurité. Autant dire que la hausse des cours du gaz est très douloureuse pour nous. »

Depuis janvier et octobre, les tarifs auxquels les verriers de Murano achètent leur gaz ont, en effet, grimpé jusqu’à 500 %. Une flambée difficilement soutenable pour cette industrie née au XIIIe siècle, déjà mise à rude épreuve par le Covid-19. Sur le seul mois d’octobre, les prix de l’énergie ont progressé de 25,3 % dans la Péninsule, selon Eurostat, soit plus encore que dans l’ensemble de l’Union européenne (22,6 %). « Les fours doivent tourner vingt-quatre heures sur vingt-quatre pour maintenir la température à 1 200 °C au centre », détaille Gianni de Checchi, directeur de Confartigianato Venezia, la confédération des artisans de Venise. « Les éteindre est complexe et coûte très cher, alors on ne le fait qu’une fois par an, pour la maintenance. Et il faut plusieurs jours pour les redémarrer. »

Vente à perte

Simone Cenedese dirige l’entreprise de vingt salariés créée par son père en 1970. « Nous consommons 50 000 mètres cubes de gaz par mois environ », explique-t-il, avant de sortir ses factures. « Pour septembre, la note était de 13 105 euros. En octobre, elle a grimpé à 48 460 euros ! »

Cet été, alors que les touristes revenaient enfin dans la lagune, les souffleurs de verre commençaient à peine à relever la tête après le Covid-19 et la « acqua alta », la marée exceptionnellement haute de novembre 2019, qui provoqua beaucoup de dommages sur l’île. Aujourd’hui, les carnets de commandes se remplissent à nouveau, mais une partie de la production sortant des fours est vendue aux tarifs négociés avant l’envolée des cours des matières premières. « Même si nous répercutons partiellement cette hausse sur nos catalogues, les rentrées d’argent supplémentaires ne seront pas pour tout de suite », ajoute Andrea della Valentina.

En attendant, beaucoup vendent à perte. Simone Cenedese, lui, a choisi d’augmenter malgré tous ses prix de 15 % à 20 %, « mais on ne peut pas plus, et certains clients ne suivront pas ». Chaque matin, beaucoup de ses confrères se lèvent avec les mêmes angoisses. Les prix retomberont-ils bientôt ? Faut-il envisager d’arrêter les fours et la production, la mort dans l’âme, comme durant le Covid-19 − au risque de perdre des commandes ? « C’est la dernière extrémité, la plus douloureuse, mais nous devrons peut-être l’envisager à Noël », explique Luciano Gambaro, à la tête de Gambaro & Tagliapietra, l’entreprise créée par son père et son oncle en 1974, également président de Promovetro Murano, le consortium représentant le secteur. « Douze des soixante usines disposant de four l’ont déjà fait. »

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