Au terme de deux semaines de négociations et des changements de dernière minute, le pacte de Glasgow, déclaration finale de la COP26 conclue par près de 200 pays, a été définitivement adopté samedi. Après de nombreux atermoiements, notamment concernant la sortie du charbon, que contient finalement cet accord ?
Après deux semaines d’âpres négociations, la COP26 a pris fin, samedi 13 novembre, avec un accord en demi-teinte, déjà largement critiqué et dont le patron de l’ONU, Antonio Guterres, a lui-même relevé les faiblesses.
Ému face au timide « pacte de Glasgow », qui encourage à accélérer la lutte contre le réchauffement climatique sans pour autant imposer de le contenir à 1,5 °C, le président de cette conférence onusienne pour le climat, Alok Sharma, a déclaré comprendre « la profonde déception », ajoutant toutefois qu’il est « également vital que nous protégions cet accord ». Un accord qui, disait-il plus tôt, « inaugure une décennie d’ambition croissante » en matière de climat.
Au cours des deux dernières semaines, en effet, les dirigeants mondiaux ont pris une série d’engagements visant à renforcer les objectifs de réduction des émissions pour 2030 d’ici la fin de l’année prochaine.
Pour la première fois, la conférence des Nations unies sur le climat s’est attaquée directement aux énergies fossiles. Mais les pays développés n’ont pas répondu aux attentes des pays en voie de développement, plus vulnérables. « Ce n’était pas une grande COP », a réagi Jean Jouzel, climatologue et ancien vice-président du Giec, invité de France 24. « Il y a eu quelques avancées, mais si c’est simplement pour discuter et ne pas mettre sur la table des engagements plus ambitieux, ça ne vaut pas le coup. » Tour d’horizon des principaux points de cet accord.
Les énergies fossiles pointées du doigt
« Historique ». C’est la première fois qu’il est fait mention des énergies fossiles. L’accord de Paris de 2015, qui vise à limiter le réchauffement de la planète « bien en deçà » de +2 °C par rapport à l’ère industrielle, si possible +1,5 °C, ne contient en effet pas les mots « charbon », « pétrole », « gaz », ni même « énergies fossiles », pourtant principales responsables de changement climatique.
Un premier projet de texte appelait les pays à « accélérer la sortie du charbon et des subventions aux énergies fossiles ».
Toutefois, sous la pression de l’Inde, de la Chine et de l’Arabie saoudite, le pacte de Glasgow a été édulcoré à la dernière minute. Le président de la COP26 a dû faire des allers-retours entre les divers groupes pour faire accepter une ultime revendication des délégations indienne et chinoise.
Le texte amendé demande aux pays signataires de « réduire » (« phase down » en anglais) alors que la rédaction initiale leur demandait de le « supprimer » (« phase out ») à terme.
« Cet accord est terni par ce revirement de dernière minute par rapport à l’ambition, assez marquée dans la précédente version, de quitter le charbon », commente Jean Jouzel. « Maintenant, il faut se mettre sur une trajectoire compatible avec l’objectif de 1,5 °C », poursuit-il. « On en est loin. On sait que les émissions ont continué à augmenter et que cette augmentation est telle que dans dix ans, tout ce qu’on émettra en gaz carbonique nous mettra hors des clous par rapport à cet objectif. »
Dans sa version finale, le texte adopté samedi appelle à « intensifier les efforts vers la réduction du charbon sans systèmes de capture (de CO2) et à la sortie des subventions inefficaces aux énergies fossiles ».
« On sait très bien ce qu’il faudrait faire pour respecter l’objectif des 1,5 °C : la neutralité carbone en 2050 », rappelle Jean Jouzel. « La Chine et l’Inde ont accepté respectivement 2060 et 2070, que tous les pays acceptent cette idée de neutralité carbone est déjà un premier pas », poursuit le climatologue. « Je ne suis pas déçu par ces engagements, le problème, c’est le fossé entre ces engagements et la réalité. »
Plus de 40 pays, dont 23 nouveaux, se sont engagés à éliminer progressivement le charbon, l’énergie fossile la plus polluante. Les membres comprennent de gros utilisateurs de charbon comme la Pologne, l’Ukraine et le Vietnam.
Les principaux pays ont déclaré qu’ils l’élimineraient progressivement dans les années 2030, les pays les plus pauvres s’engageant dans les années 2040.
L’Australie, deuxième exportateur mondial de charbon thermique – utilisé dans les centrales électriques au charbon – n’a cependant pas ajouté son nom à l’engagement.
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Déclaration conjointe des États-Unis et de la Chine
Les États-Unis et la Chine ont signé une rare déclaration conjointe engageant les deux plus grands pollueurs du monde à « des actions climatiques renforcées ».
Des promesses ont notamment été faites sur les émissions de méthane, la transition vers une énergie propre et la décarbonation. Leur mise en œuvre est prévue dans la « décennie critique des années 2020 ».
John Kerry, envoyé spécial du président des États-Unis pour le climat, a décrit cet accord comme « un impératif de coopération », tandis que le principal négociateur chinois, Xie Zhenhua, a déclaré qu’il y avait « plus d’accords entre la Chine et les États-Unis que de divergences ».
Émergence du concept de « pertes et préjudices »
La convention des Nations unies sur les changements climatiques de 1992 repose sur deux piliers : la réduction des émissions de gaz à effet de serre et l’adaptation notamment des plus vulnérables aux impacts à venir.
Mais depuis cette date, les conséquences dévastatrices du réchauffement sont devenues une réalité dans le présent et les dégâts se comptent en milliards de dollars.
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Face à cette réalité, le concept de « pertes et préjudices » a émergé, en référence aux catastrophes qui ne peuvent plus être évitées.
« Quand les émissions ne sont pas réduites suffisamment, vous entrez dans le territoire de l’adaptation, et quand l’adaptation n’est pas suffisante, vous devez faire face aux pertes et préjudices », résume le ministre de l’Économie et du Changement climatique des Fidji, Aiyaz Sayed-Khaiyum.
Mais le mécanisme mis en place en 2013 pour prendre en compte cette question est resté flou. Alors à Glasgow, les pays en développement ont tenté de faire entendre leurs revendications. En vain. Leur proposition de créer un nouveau système opérationnel de financement a été bloqué, notamment par les États-Unis craignant les implications juridiques d’un tel engagement.
Le compromis adopté met en place un « dialogue » annuel jusqu’à 2024 pour « discuter des modalités pour le financement des activités ».
« Les pays en développement demandent réparation par rapport aux dégâts liés à des événements extrêmes et là aussi, il y a une certaine logique », explique Jean Jouzel. « On a manqué de solidarité », ajoute-t-il, pointant les pays développés. « Je suis extrêmement déçu que les pays développés ne soient pas en mesure de tenir les engagements qu’ils ont pris il y a douze ans à Copenhague », réagit Jean Jouzel. « Nous avions le temps de nous préparer a cette échéance. Nous ne sommes pas au rendez-vous et c’est extrêmement regrettable. »
Réduction des émissions de méthane de 30 % d’ici à 2030
Plus de 80 pays, dont l’Union européenne et les États-Unis, se sont engagés à réduire leurs émissions de méthane, puissant gaz à effet de serre, de 30 % d’ici 2030 par rapport à 2020.
Émis par l’agriculture et l’élevage, les combustibles fossiles et les déchets, le méthane est le deuxième gaz à effet de serre lié à l’activité humaine, après le CO2.
Mettre fin à la déforestation d’ici à 2030
Plus de 100 dirigeants mondiaux ont promis de « stopper et inverser la déforestation » d’ici à 2030, c’est-à-dire en moins de dix ans.
La lutte contre la déforestation, qualifiée par le Premier ministre britannique, Boris Johnson, de « grand massacre à la tronçonneuse », est essentielle pour parvenir à l’objectif de limiter le réchauffement climatique à +1,5 °C, a-t-il insisté, rappelant que les forêts « sont essentielles à notre survie ».
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Plus de 100 pays représentant 85 % des forêts du monde ont signé cet engagement, dont le Brésil, la Russie, le Canada, la Colombie, l’Indonésie et la République démocratique du Congo. Un engagement soutenu par 14 milliards de livres sterling (16,41 milliards d’euros) de financement public et privé.
« Nous nous engageons à éliminer la déforestation illégale d’ici 2030 », a déclaré le président brésilien, Jair Bolsonaro, dont le pays abrite une grande partie de l’Amazonie. « Les forêts sont importantes pour moi car elles couvrent plus de 60 % de mon pays. »
Avec AFP
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