Tribune. Après un an de combat en Ethiopie, la responsabilité du gouvernement éthiopien dans l’engagement du pays tout entier dans la guerre civile est plus que jamais manifeste. Le 11 octobre, deux ans jour pour jour après qu’il s’est vu attribuer le prix Nobel de la paix et une semaine après son investiture par le Parlement « élu » en juin, Abiy Ahmed lance une nouvelle offensive en faisant bombarder Makalé, la capitale régionale du Tigré.
Après avoir appelé, à de multiples reprises, à un retour au statu quo ante du conflit pour entreprendre des négociations de paix et lever le blocus visant à affamer 6 millions de Tigréens, les forces tigréennes, alliées à d’autres mouvements fédéralistes, relancent les attaques. L’armée fédérale régulière est mise en déroute.
Devant la menace de moins en moins dissimulable d’une prise de la capitale, le premier ministre proclame, le 2 novembre, l’état d’urgence, dévoilant sans retenue une haine ethniquement ciblée. Le régime désigne les populations civiles tigréennes comme des ennemies de la nation et appelle les autres à s’armer. Par ses discours, il réduit une mobilisation politique, consentie ou non, à un enrôlement guerrier, souvent sous contrainte. Pendant quelques jours, ces mesures ont soulevé l’indignation des opinions publiques internationales qui ont découvert qu’Abiy Ahmed était un chef de guerre aux discours génocidaires. Rapidement, le monde a repris sa marche indifférente et les raisons d’Etat l’ont emporté.
Confiance aveugle
En considérant le régime éthiopien comme leur partenaire incontournable et en s’extasiant des promesses d’une Ethiopie transformée, puis en considérant que la chute d’Abiy n’amènerait qu’au pire, les chancelleries occidentales dans leur grande majorité n’ont pas su ni voulu voir l’implication du régime dans ce conflit. En refusant d’entendre les alertes de la société civile, en relayant obtusément la communication gouvernementale, ou en prônant la médiation sans considérer tout le spectre des forces politiques, elles ont une part de responsabilité dans les exactions commises par le régime.
Dupées par la légitimité d’un gouvernement soi-disant élu, elles ont tardé à prendre la pleine mesure des violences perpétrées par l’Etat éthiopien envers ses populations et particulièrement envers son peuple du Tigré. Les conséquences de cette confiance aveugle sont terribles. Le régime lance aujourd’hui les populations civiles dans une guerre totale.
Il nous incombe de nous interroger sur les responsabilités partagées de ce conflit. Une telle tâche ne saurait être opérée par les seuls outils « dépolitisants » du droit international qui égalisent la position des belligérants et prônent une justice hors-sol. Le conflit doit être appréhendé dans ses dynamiques multiples : sociales, territoriales et politiques. Si des gens meurent au Tigré, en Amhara, en Afar et sur les fronts éloignés de l’Oromia, ils ne meurent pas tous de la même façon, ni pour les mêmes raisons.
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