« Ces formes de travail nient la liberté de tout individu, elles font du travail une aliénation, fragilisent la notion même d’égalité », a solennellement déclaré mardi 9 novembre la ministre du travail Elisabeth Borne : face à la persistance et même à l’augmentation du travail des enfants dans le monde – en 2020, il concerne 160 millions d’enfants de moins de 15 ans, soit 8,4 millions de plus qu’il y a quatre ans, selon l’Unicef –, le gouvernement souhaite accélérer son action, en concertation avec les entreprises et les partenaires sociaux.
Elisabeth Borne, Franck Riester, ministre délégué au commerce extérieur, et Adrien Taquet, secrétaire d’Etat chargé de l’enfance et des familles, réunis au ministère du travail, ont présenté leur « stratégie nationale d’accélération pour éliminer le travail des enfants, le travail forcé, la traite des êtres humains et l’esclavage contemporain à l’horizon 2030 », et signé une lettre à destination de Guy Ryder, directeur général de l’Organisation internationale du travail (OIT).
A son échelle, la France souhaite notamment impliquer les multinationales basées sur son sol, en les invitant à surveiller les modes de travail de leurs sous-traitants à tous les niveaux de leur chaîne de valeur. Cette politique s’inscrit dans le prolongement de la loi instaurant un devoir de vigilance, en vigueur depuis 2017, qui oblige les grandes sociétés à prévenir les atteintes graves envers les libertés fondamentales.
« Pionnier » de l’Alliance 8.7
Si l’engagement est majoritairement tourné vers les pays moins avancés, les ministres ont également indiqué le travail restant à faire sur le territoire national. « Cela peut étonner que la France s’engage dans une telle démarche, car on pourrait penser que cela ne nous concerne pas, a indiqué Adrien Taquet. Malheureusement il n’en est rien, on dénombre plus de mille interventions de l’inspection du travail pour des cas de travail de mineurs ces deux dernières années. » Le ministre délégué au commerce Franck Riester estime que « les fermetures d’école liées à la crise du Covid ont aggravé ces phénomènes. Il y a eu des pertes d’emploi et de revenus dans les familles. »
La déléguée du gouvernement à l’OIT Anousheh Karvar, qui a coordonné cette stratégie nationale, pointe de son côté l’explosion de la sous-location par des jeunes de moins de 18 ans de comptes sur les plates-formes de livraison comme Uber Eats ou Deliveroo, le travail saisonnier forcé de jeunes migrants dans le secteur agricole, ou l’exploitation sexuelle qui concerne « de plus en plus de jeunes filles de nationalité française, notamment dans les cités ». « Ces phénomènes existent, on ne peut pas donner de leçon aux pays pionniers si on n’est pas à zéro », affirme la déléguée du gouvernement à l’OIT.
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