Elle s’appelait Izabela. Elle est décédée à 30 ans, le 22 septembre, d’un choc septique à sa 22e semaine de grossesse, à l’hôpital de Pszczyna, une ville de 30 000 habitants dans le sud-ouest de la Pologne, où elle avait été admise après avoir perdu les eaux. Les médecins, bien que sachant son enfant condamné – il souffrait également de malformations – et la vie de la patiente menacée, ont refusé de pratiquer un avortement immédiat, préférant attendre que le cœur du fœtus cesse de battre. La jeune femme n’a pas survécu.
Izabela est considérée par les organisations féministes comme la première victime connue de l’arrêt du Tribunal constitutionnel polonais du 22 octobre 2020, qui a jugé l’avortement en raison de pathologie constatée chez le fœtus comme inconstitutionnel, rendant l’IVG quasi illégale. Depuis que l’histoire d’« Iza de Pszczyna » a été rendue publique, début novembre, une profonde émotion a traversé le pays.
« Jamais tu ne seras seule »
Samedi 6 novembre, cette émotion s’est traduite par des manifestations d’ampleur à travers tout le pays. Sous le mot d’ordre « Pas une de plus », entre 20 000 et 30 000 personnes ont protesté à Varsovie, et plusieurs milliers d’autres dans 70 villes polonaises, mais aussi à Oslo ou à Berlin. Dans la capitale polonaise, les manifestants ont marché depuis le siège du Tribunal constitutionnel jusqu’au ministère de la santé, où ils ont observé une minute de silence. L’ambiance était calme et solennelle.
« Je pense, je sens, je décide », « L’avortement, c’est la vie », « Jamais tu ne seras seule », pouvait-on lire sur les pancartes. Ou encore « 2-2-2 9-22 5-9-7 », le numéro de téléphone du « Dream team abortif », une organisation informelle qui aide les femmes polonaises à avorter à l’étranger. Depuis un an, le nombre d’avortements légaux en Pologne est tombé à 300 cas – contre 1 000 cas annuels auparavant – et les organisations féministes parlent d’une hausse considérable de la demande des voyages abortifs.
De nombreux politiques de l’opposition se sont joints aux cortèges, dont l’ancien premier ministre et chef du principal parti d’opposition, Donald Tusk, ou le maire libéral de Varsovie, Rafal Trzaskowski. Les médias publics ont quant à eux minimisé l’événement et crié à « l’utilisation politique d’une tragédie humaine ». Conformément à la demande des organisateurs, aucun symbole partisan n’a été brandi durant les manifestations. Le sujet n’en reste pas moins éminemment politique : tout au long de la semaine, les barons de la majorité nationale conservatrice du PiS (Droit et Justice), qui contrôle étroitement le Tribunal constitutionnel, ont tenté de nier tout lien de cause à effet entre la tragédie et la nouvelle législation sur l’IVG.
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