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La Cour suprême américaine semble prête à bloquer une loi restrictive du Texas sur l’avortement

Publié le : 02/11/2021 – 04:49

Une majorité des juges de la Cour suprême des États-Unis a semblé, lundi, prête à bloquer une loi du Texas qui, depuis deux mois, limite drastiquement le droit des Texanes à interrompre leur grossesse. Les neuf sages débattent du mécanisme légal créé par l’État.

Des pancartes aux messages irréconciliables – « L’avortement est essentiel » ou « Laissez leurs coeurs battre » – ont été brandies devant la Cour suprême des États-Unis, lundi 1er novembre ; défenseurs et opposants à l’avortement s’étaient réunis devant le siège de la haute cour, à Washington, pour une audience très attendue.

Une majorité des juges de la Cour suprême des États-Unis a semblé encline à bloquer une loi du Texas qui représente le coup le plus dur porté au droit à l’avortement en près de 50 ans. Dans le bâtiment de marbre blanc, les neuf sages n’ont pas discuté de ce droit mais seulement du mécanisme légal créé par le Texas.

Lors d’une audience organisée en urgence, deux juges conservateurs, Brett Kavanaugh et Amy Coney Barrett, tous deux nommés par l’ex-président Donald Trump, ont exprimé leur scepticisme face à l’architecture inédite de la loi, ce qui devrait faire basculer la majorité.

Le conservateur Brett Kavanaugh, qui avait laissé la loi entrer en vigueur en septembre, s’est cette fois inquiété « sur les implications pour d’autres droits constitutionnels ». Pourrait-il y avoir « une loi qui permettrait de réclamer des millions de dollars à quiconque vend un fusil AR-15 ? », a-t-il notamment demandé.

Sa consoeur, Amy Coney Barrett, a, pour sa part, souligné que la loi ne pouvait être bloquée au niveau des tribunaux des États, contrant l’argument-phare des autres conservateurs qui semblaient vouloir s’en remettre à la justice locale.

Ironisant sur « le génie » qui a inventé ce dispositif, la juge progressiste Elena Kagan a dit « ne pas comprendre » comment ses confrères avaient pu dire « on n’a jamais vu ça, alors on ne peut rien faire ».

Une audience réconfortante

« Les juges ont semblé reconnaître que la position du Texas est extrême et menace les fondements de notre démocratie constitutionnelle », a commenté après l’audience Marc Hearron, avocat de l’organisation Whole Woman’s Health qui gère quatre cliniques pratiquant des interruptions de grossesse au Texas.

« Nous sommes réconfortés par les questions vigoureuses posées aujourd’hui », a ajouté Julie Murray, avocate de l’organisation Planned Parenthood. « Mais la réalité sur le terrain (…) c’est que les patientes continuent de souffrir. »

Depuis le 1er septembre, il est interdit d’avorter au Texas quand les battements de coeur de l’embryon sont perceptibles, soit après six semaines de grossesse, même en cas d’inceste ou de viol.

Une dizaine d’autres États conservateurs ont adopté des lois comparables mais elles ont toutes été invalidées en justice car elles violent la jurisprudence de la Cour suprême. Celle-ci a reconnu en 1973 le droit des femmes à avorter et précisé en 1992 qu’il s’applique tant que le foetus n’est pas viable hors de l’utérus, soit vers 22 semaines de grossesse.

Une longue bataille à suivre

Le Texas, véritable laboratoire des idées les plus conservatrices, a toutefois imaginé un dispositif exceptionnel qui complique l’intervention de la justice fédérale.

Sa loi confie « exclusivement » aux citoyens le soin de faire respecter cet interdit, en les encourageant à poursuivre au civil les personnes et organisations qui aident les femmes à avorter au-delà de six semaines. En cas de victoire devant la justice, ces citoyens obtiendront 10 000 dollars de dédommagement, prévoit la loi. Ses détracteurs y voient une « prime à la délation ».

Saisie en urgence une première fois il y a deux mois, la Cour suprême s’était abritée derrière ces « questions nouvelles de procédure » pour refuser d’intervenir.

Son inaction, perçue comme le signe de l’influence des trois magistrats nommés par Donald Trump, avait été vivement critiquée à gauche, le président démocrate Joe Biden fustigeant une décision qui « insulte l’État de droit ».

La bataille judiciaire s’était ensuite intensifiée, forçant la Cour suprême à se saisir pleinement du dossier. Sa décision, qui pourrait geler elle-même la loi ou renvoyer le dossier vers un tribunal de première instance, devrait être publiée assez rapidement.

Quelle qu’elle soit, la bataille ne sera pas terminée : la haute cour doit examiner le 1er décembre une loi du Mississippi qui interdit d’avorter après 15 semaines de grossesse. Pour les observateurs, elle pourrait profiter de ce texte de facture plus classique pour commencer à détricoter sa jurisprudence, en revenant a minima sur le critère de « viabilité du foetus ».

Avec AFP

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