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Irlande du Nord : dialogue de sourds entre Londres et Bruxelles

Affiches contre la frontière maritime entre l’Irlande du Nord et la Grande-Bretagne à Belfast, le 29 septembre 2021. PAULO NUNES DOS SANTOS POUR « LE MONDE »

A quoi joue donc le gouvernement britannique en Irlande du Nord ? Cherche-t-il vraiment à trouver une solution pour faciliter la vie des Nord-Irlandais en allégeant les contraintes de la frontière en mer d’Irlande imposée par le Brexit ? Ces questions sont dans toutes les têtes à Dublin et Bruxelles alors que David Frost, le ministre pour l’Europe de Boris Johnson, devait repousser par avance, lors d’un discours à Lisbonne, mardi 12 octobre, des propositions que la Commission européenne publiera mercredi 13 octobre.

Sur demande de Londres, l’institution communautaire est pourtant prête à réviser substantiellement le « protocole nord-irlandais », la partie du traité du Brexit aménageant le statut dual de la province (membre du Royaume-Uni mais avec encore un pied dans le marché intérieur européen). Bruxelles pourrait proposer un allègement considérable des contrôles douaniers pour les produits venus de Grande-Bretagne à destination uniquement de l’Irlande du Nord.

Mais David Frost a déjà fait savoir que ses propositions seront insuffisantes tant que la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) conservera un droit de regard sur l’Irlande du Nord. Or il s’agit d’une ligne rouge au sein des institutions européennes, où l’on répète que le marché intérieur n’est viable que si ceux qui en profitent – dont la province britannique – sont soumis aux mêmes règles et donc à la Cour de Luxembourg. La CJUE « a créé un très fort déséquilibre dans la manière qu’a le protocole de fonctionner », devait affirmer M. Frost depuis Lisbonne. « Sans nouveaux arrangements sur ce point, le protocole n’aura jamais le soutien nécessaire pour survivre », devait ajouter celui qui a pourtant approuvé le protocole au nom du gouvernement Johnson fin 2019.

Les propositions de la Commission, avant que les Vingt-Sept n’en calent les détails, répondent largement à la préoccupation des acteurs économiques locaux d’alléger leurs obligations en matière de paperasserie. « En faisant une offre assez allante, note un diplomate bruxellois, la Commission cherche à introduire un coin entre les Irlandais du Nord et Londres. » En clair, à convaincre la province britannique que Bruxelles n’est pas cette instance rigide et doctrinale que décrit Boris Johnson et que la Commission veut simplifier la vie de ses habitants quand, en face, Londres mène une politique idéologue.

« Main tendue européenne »

« Si les propositions de la Commission sont bien celles-ci, il n’y a plus aucun fondement à activer l’article 16 », juge l’eurodéputée macroniste Nathalie Loiseau, faisant référence à la clause du protocole permettant sa suspension unilatérale que M. Frost menace régulièrement d’activer. « Il est intéressant de noter que l’Irlande du Nord va beaucoup mieux que le reste du Royaume-Uni – il n’y a pas de pénurie. C’est là une illustration en temps réel des avantages à être dans le marché unique », relève t-on à la Commission. M. Frost « semble plus intéressé par la posture politique que par faire fonctionner le protocole. Les gens et les entreprises en Irlande du Nord en ont marre de ses menaces répétées et de l’incertitude qu’elles entretiennent », a déploré lundi Louise Haigh, la ministre à l’Irlande du Nord du cabinet fantôme de Keir Starmer, chef de file de l’opposition travailliste.

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