Ilana Cohen courait vers son cours d’éthique de l’environnement, le 9 septembre, à Harvard (Cambridge, Massachusetts), quand elle a découvert le mail du président de l’université sur son portable. « Chers membres de la communauté de Harvard. »
L’étudiante, 20 ans, en deuxième année mais déjà une « ancienne » dans la mobilisation pour le climat, est tombée à la renverse. Lawrence Bacow annonçait une décision que les étudiants réclamaient depuis dix ans : le désinvestissement de l’université du secteur des énergies fossiles. « Le changement climatique est la menace la plus lourde de conséquences que l’humanité ait à affronter », justifiait-il en introduction, comme si ses jeunes interlocuteurs pouvaient l’ignorer.
Président depuis 2018, Lawrence Bacow évoquait la nécessité d’agir « en tant que citoyens, en tant que chercheurs et en tant qu’institution ». Le message annonçait que Harvard allait se défaire de ses investissements dans les secteurs du pétrole et du gaz (l’université s’était déjà séparée de ses investissements dans le charbon). « Compte tenu de la nécessité de décarboner notre économie et de notre responsabilité à prendre des décisions à long terme qui soient en phase avec notre mission de recherche et d’enseignement, nous ne pensons pas que de tels investissements soient judicieux. »
Deux jours plus tôt, une centaine d’étudiants manifestaient encore à Harvard Square, le cœur de l’université, sans grand espoir d’être entendus.
Les étudiants ont célébré la victoire « avec grande joie et fierté ». Victoire éclatante autant qu’inattendue. « Je ne pensais pas que je verrais ce résultat pendant ma scolarité, relate Ilana Cohen. C’est une preuve incroyable du pouvoir de la mobilisation. »
Harvard étant l’université la plus riche des Etats-Unis – son fonds de dotation s’élève à 42 milliards de dollars (36 milliards d’euros) –, la décision de son conseil d’administration a aussitôt eu des répercussions sur les campus : Boston University, assise sur un trésor de 3 milliards de dollars, a emboîté le pas, le 23 septembre, expliquant vouloir « être du bon côté de l’histoire ». L’université du Minnesota, le lendemain. « Harvard était le symbole du statu quo, commente Richard Brooks, de l’organisation Stand.earth de San Francisco. Le curseur s’est déplacé. L’opinion évolue en faveur d’actions plus fortes pour le climat. »
Evolution culturelle
Selon le site Fossil Free, financé par 350.org, l’association qui est à l’origine de la campagne, une centaine d’universités ont pris l’engagement de désinvestir dans les industries fossiles, partiellement ou totalement. Les deux dernières années ont été fastes : Rutgers University (New Jersey), l’université du Michigan, Georgetown University (Washington D. C.), Brown (Rhode Island), Middlebury (Vermont), l’université de Californie.
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