« Je ne regrette pas la décision de faire passer l’intérêt national de l’Australie en premier. Je ne le regretterai jamais. » Quatre jours après avoir rompu un gigantesque contrat conclu en 2016 avec la France pour la fourniture de sous-marins conventionnels, le premier ministre australien, Scott Morrison, a déclaré, dimanche 19 septembre, que le gouvernement français savait que Canberra avait déjà de « profondes et graves réserves » concernant les engins français.
« Je pense qu’ils [les Français] auraient eu toutes les raisons de savoir que nous avions de profondes et graves réserves quant au fait que les capacités du sous-marin de classe Attack ne répondaient pas à nos intérêts stratégiques, et nous avions clairement fait savoir que nous prendrions une décision en fonction de nos intérêts stratégiques nationaux », a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse à Sydney.
Pour le premier ministre australien, il aurait été « négligent » d’aller de l’avant avec ce contrat malgré les conseils des services australiens de renseignement et de la défense, qui estimaient que cela irait à l’encontre des intérêts stratégiques de l’Australie.
« Contrariété des Français »
Plus tôt dans la journée dimanche, le ministre de la défense australien, Peter Dutton, avait déclaré que son gouvernement avait été « franc, ouvert et honnête » avec la France sur ses préoccupations concernant l’accord, qui a dépassé le budget et pris des années de retard.
Le ministre a déclaré comprendre la « contrariété des Français », mais que « les suggestions selon lesquelles le gouvernement australien n’a[vait] pas signalé ses inquiétudes défi[ai]ent, franchement, ce qui est dans le dossier public et certainement ce qui a[vait] été dit publiquement pendant une longue période ».
« A aucun moment, d’aucune manière » la France n’a reçu « un signal clair que le contrat serait rompu », dément, dimanche, dans les colonnes du Guardian, l’ambassadeur de France en Australie, Jean-Pierre Thébault. « Le sentiment de trahison est très fort », ajoute-t-il.
« Mensonge », « duplicité »
La France est furieuse de la décision de l’Australie de se retirer d’un contrat de 90 milliards de dollars australiens (56 milliards d’euros) pour l’achat de sous-marins français en faveur de navires américains à propulsion nucléaire. Elle a rappelé ses ambassadeurs à Canberra et Washington.
S’exprimant sur France 2 samedi le ministre des affaires étrangères français, Jean-Yves Le Drian, avait évoqué une « crise grave » et dénoncé une « duplicité » des Etats-Unis et de l’Australie. « Il y a eu mensonge, il y a eu duplicité, il y a eu rupture majeure de confiance, il y a eu mépris, donc ça ne va pas entre nous », a-t-il déclaré. Il a qualifié le retrait des ambassadeurs d’acte « très symbolique » visant à « montrer à nos pays anciennement partenaires que nous avons un très fort mécontentement, qu’il y a vraiment une crise grave entre [la France et l’Australie] ».
Le ministre de la défense australien a déclaré avoir personnellement exprimé ces préoccupations à son homologue française, Florence Parly, et a souligné la « nécessité pour l’Australie d’agir dans son intérêt national ».
Selon M. Dutton, Canberra n’était pas en mesure d’acheter des navires à propulsion nucléaire français, en raison des opérations de maintenance qui doivent avoir lieu tous les dix ans et qui prévoient le rechargement du combustible nucléaire, ce qui n’est pas le cas des sous-marins américains et justifie le choix de ces derniers, l’Australie ne disposant d’aucune centrale nucléaire.
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