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Une Guinéenne passe devant une affiche du président déchu Alpha Condé, à Conakry, le 16 septembre 2021. JOHN WESSELS / AFP
Docteur en philosophie, Amadou Sadjo Barry est professeur et chercheur en éthique des relations internationales. Auteur d’un Essai sur la fondation politique de la Guinée (éd. L’Harmattan, mars 2021), l’intellectuel guinéen revient, dans un entretien au Monde Afrique, sur les causes de la résurgence des putschs en Afrique de l’Ouest. Double coup d’Etat militaire au Mali en août 2020 et mai 2021, « coup d’Etat institutionnel » au Tchad en avril et, enfin, putsch en Guinée le 5 septembre : pour Amadou Sadjo Barry, cet enchaînement souligne la faiblesse des modèles politiques et institutionnels de ces Etats dits républicains mais incapables de garantir un transfert pacifique du pouvoir.
Pourquoi assiste-on à une résurgence des coups d’Etat en Afrique de l’Ouest ?
Malheureusement, en Guinée, au Mali comme au Tchad, les logiques individuelles ont amputé le pouvoir de sa dimension publique. Ces coups d’Etat soulignent l’échec des transitions précédentes à émanciper les Etats de leurs dirigeants et à consacrer la rupture avec les modalités autoritaires et patrimonialistes de la gouvernance politique. Le champ politique de ces pays a toujours été un lieu de bataille, de combat sans pitié pour le contrôle du pouvoir et des privilèges auxquels il donne lieu.
Quand vous êtes président, ministre ou dans leur entourage, vous êtes hors-la-loi. En Guinée, la population était exsangue parce qu’écrasée par le poids de la corruption et les ponctions. Peu de temps avant sa chute, Alpha Condé s’est permis d’augmenter le prix du carburant et des taxes téléphoniques. C’était le coup de trop. Ces actes d’indifférence assumée vis-à-vis du peuple expliquent pourquoi, en Guinée comme au Mali [en août 2020], les populations ont salué les coups de force. Il n’y avait que l’armée à pouvoir donner de l’oxygène aux populations.
Pourquoi les militaires s’immiscent-ils sur le terrain politique ?
« Nos institutions ont été capturées, assommées par l’arbitraire des individus. »
Il n’y a pas d’autre arbitre. L’Etat n’existe pas. Dans une société dite démocratique, ce sont les institutions qui règlent les différends. Au Mali comme en Guinée, le cadre juridique et institutionnel des Etats n’est pas effectif. S’il l’était, Alpha Condé n’aurait pas pu briguer son troisième mandat. L’armée n’aurait pas non plus été mobilisée pour réprimer des manifestations. Nos institutions ont été plongées dans un grand vide. Elles ont été capturées, assommées par l’arbitraire des individus.
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