LETTRE DE JOHANNESBURG
Ils ont eu raison d’y croire. Quatre hommes, logés, avant leur expulsion le 13 août, dans des abris de fortune dans un parc public de Johannesburg, viennent une semaine plus tard de se voir réintégrés dans leur droit : non seulement d’habiter le parc mais également de reprendre possession de leurs effets dispersés ce jour-là.
L’arrêt de la Haute Cour du Gauteng (province où se trouve Johannesburg, la plus riche et la plus peuplée d’Afrique du Sud) ordonne que leur soit restitué tout ce dont ils ont été privés lors de l’intervention menée conjointement par la police, une société de sécurité, l’administration des parcs de la ville, et une organisation de défense du parc, qui comptent bien en voir partir ses occupants.
Ce 13 août, les abris de ces derniers avaient été démantelés, et tout ce qu’ils contenaient avait été confisqué ou détruit. Les juges de la Haute Cour ont estimé que les plaignants avaient en conséquence été victimes d’une action non seulement « illégale », mais également « inconstitutionnelle », se référant à l’article 26.3 de la Constitution sud-africaine, qui établit que nul « ne saurait être expulsé de son domicile, ou voir son logement détruit, sans un ordre d’un tribunal pris après avoir pris en considération toutes les circonstances liées à cette action ».
Ce qui est reconnu par ce jugement, c’est que les pauvres hères qui avaient trouvé refuge à Albert’s Farm – le nom de ce parc de Johannesburg qui est le deuxième plus étendu de la ville, avec 74 hectares selon l’association des résidents ; celle-ci s’oppose de toutes ses forces à l’installation d’habitants dans son enceinte – ont beau être les plus pauvres des plus pauvres, ils n’en ont pas moins des domiciles, et des droits.
C’est l’un des paradoxes toujours décoiffants de l’Afrique du Sud : le pays, réputé pour ses inégalités record, a aussi une Constitution qui, à l’inverse, compte parmi les plus « progressistes » de la planète, conçue comme une matrice pour fonder une société plus juste, et égalitaire.
« Tentes de fortune »
Comment cela fonctionne-t-il dans le monde réel ? L’exemple d’Albert’s Farm est une bonne illustration. Le droit constitutionnel des quatre plaignants a prévalu : celui de considérer qu’un domicile ne prend pas seulement son sens en fonction de ses matériaux de construction, ni de l’histoire de son établissement. Les acteurs de l’expulsion du 13 août se voient sommés de remettre à la disposition de Matthew Tomodi, dit « le Shérif », Solomon Tjia, Sbusiso « Sbu » Mthembu et Maduna Lerato ce qui leur a été pris, à savoir : des « tentes de fortune, des matériaux de construction, du bois, des vêtements, des chaussures, de la nourriture, des téléphones mobiles et des déchets recyclables ».
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