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Enquête« Elon Musk, un héros américain » (5/6). Colérique, injuste, déloyal… L’entrepreneur a la réputation de mettre une pression maximale sur ses collaborateurs. Pour Musk, tel est le prix à payer pour vivre une épopée industrielle qui dessine l’avenir de l’humanité.
Mary Beth Brown était le bras droit d’Elon Musk. « Quand vous aviez une question, elle avait la réponse : oui ou non. Et c’était presque toujours ce que ce pensait Elon », se souvient James McLaury, ancien ingénieur de SpaceX. Et il ne fallait pas s’aventurer à la court-circuiter en demandant directement à Elon Musk son avis : c’était s’exposer à un retour de flamme. Mary Beth Brown était dévouée corps et âme à son patron, dont elle gérait le double agenda chez Tesla et SpaceX, au point d’y passer ses jours et ses nuits. « Sa mère lui avait acheté un chien, ça lui donnait une excuse pour aller à la maison de sa fille afin de prendre soin d’elle », raconte James McLaury au Monde.
Et puis un jour Mary Beth Brown est partie. Début 2014, après douze années passées au côté de son patron, elle avait eu le malheur de demander un bonus et une augmentation à la hauteur de ses responsabilités croissantes, alors que ne cessait de grandir l’empire Musk. Elle fut licenciée sans ménagement. « Elon lui a dit : “On va faire une expérience, tu vas prendre des vacances et le mois où tu reviendras, on verra comment cela s’est passé sans toi”, raconte l’ingénieur Jim Cantrell, celui qui avait accompagné Musk en Russie pour tenter d’y acheter des fusées. Au retour, il lui a dit qu’il la virait car cela s’était bien passé sans elle. » Et de déclarer, dans un soupir, en français : « Il est bête, parfois ! » Selon les informations circulant en interne, Mary Beth Brown aurait eu un différend avec l’épouse d’Elon Musk, l’actrice britannique Talulah Riley, qui trouvait qu’elle avait une emprise trop forte sur son mari.
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Peu importe, au fond : l’épilogue de l’histoire illustre aux yeux de ses détracteurs l’impitoyable brutalité d’Elon Musk, qui a dû s’en expliquer en août 2017 sur Twitter : « Mary Beth a été une assistante incroyable pendant plus de dix ans, mais à mesure que la complexité de l’entreprise augmentait, le rôle exigeait plusieurs spécialistes contre un généraliste. »
« Faire partie de la révolution »
Rejoindre les entreprises d’Elon Musk est la garantie de faire une croix sur sa vie. C’est accepter de travailler sans relâche, plus de quatre-vingts heures par semaine, avec l’un des patrons les plus exigeants qui soient. C’est intégrer un commando où chacun a une mission précise à remplir ; la pression sur les troupes est maximale.
« Il y a des jours où on travaillait de dix-neuf à vingt heures. On se rasait dans les toilettes », se souvient Ryan Popple, qui rejoint l’équipe financière de Tesla en 2007 pour trois ans. « Mais le grand avantage, c’est cette capacité à prendre les décisions et à les exécuter, renchérit James McLaury. A la NASA, chez Boeing, chez Lockheed Martin, il faut quatorze feux verts pour tourner une vis. Chez SpaceX, c’est : “Conçois, teste, et si ça marche, avance.” On supprime toutes les conneries. Le slogan, c’est : ne cherchez pas d’excuse, trouvez des solutions. » McLaury, après avoir quitté SpaceX en 2012, a pris une année sabbatique. Il était lessivé, mais aussi lesté d’un bon paquet d’actions de l’entreprise. Combien ? « Ce n’est pas votre affaire. Mais je suis financièrement à l’abri du besoin », nous rembarre-t-il.
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