Au lendemain d’une 15eme étape pénible qui l’a vu basculer de la 2eme à la 9eme place du classement général, le coureur français Guillaume Martin a profité de la journée de repos de ce lundi pour faire le point sur son Tour de France. Et pour adresser critiquer sévèrement l’attitude de Mathieu van der Poel qui a décidé de quitter la Grande Boucle au bout d’une semaine pour se préparer pour les JO de Tokyo.
Guillaume Martin, vous avez eu un week-end en forme de montagnes russes. Quel est votre bilan de ces deux jours ? Etes- vous déçu d’avoir perdu la place sur le podium ?
Je suis plutôt un animal à sang froid, je ne m’enflamme pas quand les autres s’enflamment autour de moi. Je ne m’inquiète pas quand tout le monde est effondré. J’ai toujours été lucide, je n’ai jamais dit que j’allais gagner le Tour de France. Aujourd’hui je suis 9ème au général, sensiblement à ma place, à mon niveau. Hier (dimanche) après les efforts de samedi, je bascule dans le port d’Envalira. Dans le groupe principal on était plus nombreux mais je bascule complétement à fond, les explications disaient que quand ils relancent dans la descente j’arrive à suivre. Je suis un battant, j’ai fait ce que j’ai pu. En troisième semaine du Tour il y a plus trop d’état d’âme, et pas de déception, on fait avec les tripes, avec ce que l’on a.
Dans ce Tour complétement fou, n’y a-t-il pas de place pour prendre une échappée et récupérer du temps au général ?
La réponse est dans la question. Ce tour est fou, et j’espère qu’il va le rester. Il y a encore un terrain pour partir à l’offensive. L’étape de demain (mardi entre Pas de la Case et Saint-Gaudens, ndlr) peut réussir à une échappée. Ensuite c’est particulier, ça part sur du plat. Pour se glisser dans une échappée avec le profil comme le mien c’est un peu plus compliqué mais on ne sait jamais. On peut avoir des mouvements de courses dans le final. Il y a trois cols qui s’enchainent, vraiment difficiles, et assurément il y aura des mouvements de course. L’équipe Ineos ne va pas baisser les bras non plus. A un moment donné, ils essayeront de rendre la course folle et joueront le tout pour le tout.
Vous dites que vous n’êtes pas du genre à vous enflammer. Ce n’est pas le cas de votre manager…
On connait tous Cédric Vasseur, c’est quelqu’un de passionné. Il s’enflamme assez vite, j’ai entendu ses déclarations mais moi le soir même j’ai bien dormi. Je n’ai pas rêvé du maillot jaune, je n’ai pas fait trop attention à ses déclarations qui ont été faites sous le coup de l’émotion.
Pensez-vous que Tadej Pogacar puisse avoir des difficultés lors de cette troisième semaine ?
Le seul moyen de le mettre en difficulté, c’est de rendre la course folle. Je crois que la seule course qu’il a perdue cette année, c’est lors du Tour du Pays Basque parce que dans la descente il y a pas mal de cassures et il n’a pas su comment gérer. Hier (dimanche) on a vu qu’il a basculé seul. Si Ineos arrive à l’isoler, je ne sais pas s’il peut paniquer. Il a l’air solide.
Les Français sont-ils au niveau, avec les écarts creusés ?
C’est un débat qui revient tous les ans. Si on compare à l’an dernier, tout le long de la journée à l’arrivée aux Champs-Elysées, on m’avait parlé du mauvais bilan des Français, que l’on n’était pas à la hauteur. Là, j’ai entendu vos confrères qui ont fait renaître ce débat. On est dans le jeu, il ne faut pas oublier que le cyclisme est un sport mondialisé, il y a des Equatoriens, des Slovènes et ce n’est plus le cyclisme des années 60. On est dans le jeu. Julian Alaphilippe a gagné une étape, a porté le maillot jaune, on est souvent présents dans les échappés. Et il y a pas mal de nations qui ne peuvent pas se targuer d’être dans les premiers, on est au niveau.
Vous retrouvez à jouer le général, au risque de finir fatigué. N’est-ce pas un problème pour vous avant les Jeux olympiques ?
J’irai à Tokyo c’est sûr. Systématique après le Tour de France, j’ai de bonnes sensations la semaine suivante, je suis assez confiant. Sur les trois derniers jours de course ; ça sera plus calme et je pense que le Tour est le même pour tout le monde. Tous participent à la même course.
Mathieu Van der Poel s’est arrêté au bout d’une semaine…
Moi, ce n’est pas mon état d’esprit et ma manière d’envisager la compétition. Tout le monde s’est enflammé avec Mathieu la première semaine. Avec du recul c’est facile de tout donner et samedi, au bout de sept jours, de décider de partir. L’engagement n’est pas le même quand on sait qu’on part pour une semaine ou pour trois semaines. Il a bien fait le bordel dans la course et ensuite il nous a laissé avec notre fatigue. Je trouve ça un peu facile et pas très respectueux du Tour.
Comment réagissez-vous aux performances de Chris Froome ?
De manière générale, je ne juge pas trop les actions des autres. C’est courageux de sa part de continuer, il a son chemin en tête. Pas mal de voix extérieures l’attaquent et lui disent d’arrêter et lui veut revenir au top. En tout cas cette ambition de continuer à essayer de revenir à son plus haut niveau alors que plus rien ne lui oblige est honorable.
Percevez-vous un changement au niveau du regard du public ?
Tout au long de ce Tour et durant tous les Tours auxquels j’ai participé, j’ai senti qu’il y avait un engouement qui naissait. C’était particulièrement marquant hier avec beaucoup d’encouragements sur le bord des routes. Cela faisait vraiment plaisir. Après, je ne suis pas un coureur qui fait des coups, je suis toujours présent. Ma force est ma régularité, ce n’est pas ce qui est le plus spectaculaire et c’est peut-être pour ça que Julian Alaphilippe, par exemple, est plus populaire. C’est très plaisant de recevoir ces encouragements mais ce n’est pas ça qui me fait faire du vélo.
Pensez-vous pour pouvoir remonter à nouveau au classement et envisager le Top 5 voire mieux ?
Ca va être de plus en plus dur. Je n’oublie pas qu’il y a un chrono à la fin qui m’est aussi défavorable. Mais l’échappée de samedi, je ne l’avais pas anticipée. S’il y a une nouvelle opportunité j’essaierai de la saisir.
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