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Réglementation sur les « nuisibles » : entre avancées et statu quo

Le Conseil d’Etat vient (enfin !) de déclasser le Putois d’Europe de la liste des « nuisibles ». Une bonne nouvelle pour cette espèce vulnérable dont les effectifs se raréfient drastiquement. La Fondation 30 Millions d’Amis déplore toutefois que d’autres espèces n’aient pas fait l’objet d’un déclassement similaire.

Le Putois d’Europe n’est plus considéré comme un « nuisible » ! Le Conseil d’Etat a effectivement annulé – partiellement – l’arrêté du 3 juillet 2019 qui classait comme « espèce susceptible d’occasionner des dégâts » (ESOD) le Putois, dont l’état de conservation est, selon le juge, « défavorable » (07/07/2021). En revanche, les autres espèces demeurent dans ce classement, exception faite pour quelques départements.

Concernant les putois, ils ne pourront plus être détruits sur le territoire national au titre de la régulation des « ESOD ». Autrement dit, il ne pourront être tués ‘’qu’en’’ période de chasse. Victime de la dégradation de son habitat, de la raréfaction de ses ressources alimentaires et de collisions routières, le Putois d’Europe est inscrit depuis 2017 sur la liste rouge nationale des mammifères menacés en France selon l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Pourtant, l’espèce continuait paradoxalement d’être tuée dans des conditions cruelles, au titre de son statut de « nuisible ». Une situation d’autant plus aberrante que les dégâts qu’ils occasionnent sur les élevages sont inexistants ou – au pire – marginaux.

Son déclassement pourrait ouvrir la voie « à l’adoption par le ministère de l’écologie d’une protection plus stricte de l’espèce », espère la Ligue pour la Protection des Oiseaux (LPO). Un souhait partagé depuis plusieurs années par de nombreux experts que sont la Société Française pour l’Etude et la Protection des Mammifères (SFEPM), le Conseil National de la Protection de la Nature (CNPN), le Ministère National d’Histoire Naturelle (MNHN) et l’Union internationale pour la Conservation de la Nature (UICN).

Un déclassement partiel et territorial

Outre le cas du Putois, 56 autres classements ont été contestés par les organisations de protection animale. Malheureusement, « malgré des arguments étayés et circonstanciés, le Conseil d’Etat n’a prononcé au final qu’une poignée d’autres déclassements », déplore la LPO. Pire ! « A la demande des chasseurs, le Conseil d’Etat a même ordonné le reclassement ESOD de la Pie bavarde et de la Fouine dans le département du Calvados, fustige la LPO. Beaucoup trop d’animaux continuent d’être indûment tués en raison de leur classement ».

Si la Martre des pins, le Renard roux, la Pie bavarde et l’Etourneau sansonnet sont désormais exclus de la liste des « nuisibles », ils ne le sont que dans quelques départements. Ainsi, le Renard roux ne pourra plus être traqué, ni dans les Yvelines ni dans l’Essonne (ainsi que dans une partie des Vosges et Val d’Oise), mais pourra continuer d’être détruit dans la plupart des autres départements de métropole (hors Paris, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis, Corse). D’autres espèces – à l’instar du Geai des chênes, de la Fouine ou de la Belette – n’ont fait l’objet d’aucun déclassement. Or, non seulement elles ne provoquent aucun dégât avéré, mais de surcroît leur rôle écologique est indéniable : plantation d’arbres, régulation des petits rongeurs…

Absence de réponse ministérielle

Dès 2020, une cinquantaine d’ONG de protection animale ont demandé à la ministre de la Transition écologique et solidaire Barbara Pompili de réévaluer cette réglementation qu’elles considèrent « inéquitable, biaisée et orientée exclusivement vers la destruction »Primo, il a été établi que le classement ne prend nullement en compte les services écosystémiques rendus par les espèces visées, dont certaines sont classées ESOD malgré l’absence de dégradations significatives et avérées. Deuxio, l’impact de la destruction de ces animaux n’a fait l’objet – depuis l’entrée en vigueur du dispositif en 2012 – d’aucune évaluation. Tertio, le classement fait fi des méthodes alternatives aux mises à mort, telles que les moyens de protection.

A défaut de réponse ministérielle, la Fondation 30 Millions d’Amis a donc décidé de soutenir, aux côtés des 49 organisations, la pétition (qui a obtenu 55 000 signatures !) visant à mettre en place cet audit (28/06/2021). « Le Conseil d’Etat laisse malheureusement assez peu d’espoir quant à un véritable changement de paradigme dans la relation que nous entretenons avec la faune sauvage, conclut le Président de la LPO Allain Bougrain Dubourg. L’Homme ne doit plus s’arroger le droit de détruire des espèces vivantes au seul prétexte qu’elles pourraient nuire… à ses intérêts ! »

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