Portés en Thaïlande autour du cou ou accrochés au rétroviseur, les amulettes, ces pendentifs bouddhistes porte-bonheur, sont maintenant en vente sous forme numérique grâce à la technologie blockchain, qui garantit leur authenticité.
Le marché des jetons non fongibles (NFT), ces images virtuelles qui vont de simples mèmes trouvés sur internes jusqu’à des œuvres d’artistes reconnus, a investi le monde de l’art ces derniers mois, certaines pièces numériques se vendant plusieurs millions de dollars aux enchères.
Ekkephong Khemthong a décidé d’appliquer cette tendance au bouddhisme en profitant de la passion des Thaïlandais pour les objets bénis par des moines qu’ils vénèrent.
« Je suis un collectionneur d’amulettes et je réfléchissais à la manière dont je pourrais faire connaître les amulettes aux étrangers et au monde entier », a déclaré à l’AFP le fondateur de « Cruptoamulets ».
Des amulettes bouddhistes vendues sur un marché de Bangkok, le 2 juin 2020 en Thaïlande (AFP/Archives – Mladen ANTONOV)
Collectionner les statuettes ou bibelots religieux est un passe-temps extrêmement populaire en Thaïlande, à majorité bouddhiste, où la capitale Bangkok possède un marché dédié à ces objets aux couleurs kaléidoscopiques supposés protéger des esprits et apporter la chance.
Leur valeur peut atteindre des milliers de dollars s’ils ont été bénis par un moine célèbre.
– Bénies et authentiques –
Pour ses amulettes numériques, Ekkapong a fait appel à une figure religieuse du nord-est du pays, Luang Pu Heng qui a béni ses objets virtuels au cours d’une cérémonie aussi traditionnelle que pour des amulettes réelles.
Le moine bouddhiste Luang Pu Heng lors d’une cérémoniede bénédiction d’amulettes numériques, le 9 juin 2021 à Bangkok (COURTESY OF EKKAPHONG KHEMTHONG/AFP – Daye CHAN)
« Je respecte ce moine et j’aimerais que le monde entier le connaisse. Il est un symbole de chance dans les affaires », explique Ekkapong.
Le vieil homme a aspergé son propre visage d’eau bénite tandis que ses disciples en robe safran chantaient et dispersaient des pétales jaunes sur l’autel où les portraits étaient installés.
A 95 ans, le moine n’a pas tout de suite compris ce qu’était une crypto-amulette.
« C’est très difficile, alors nous avons simplement essayé de simplifier les choses », a déclaré à l’AFP l’informaticien du projet Daye Chan.
« Nous lui avons dit que c’était comme bénir des photos ».
Avantage des crypto-amulettes, selon lui, elles sont infalsifiables contrairement aux amulettes traditionnelles vendus sur les marchés.
« Il y a tellement d’amulettes produites en masse […] La traçabilité n’est pas garantie et ces articles physiques peuvent être facilement contrefaits », explique Daye Chan.
Cérémonie de bénédiction d’amulettes numériques, le 9 juin 2021 à Bangkok, en Thaïlande (COURTESY OF EKKAPHONG KHEMTHONG/AFP – Daye CHAN)
Les NFT utilisent la technologie blockchain, qui permet de garder la trace de toutes les transactions effectuées depuis la création de l’objet numérique.
« Pour notre amulette, même cent ans plus tard, on pourra toujours vérifier l’historique et s’assurer de l’authenticité grâce à la blockchain », a déclaré Chan.
– « Expériences chanceuses » –
L’achat s’effectue en ligne sur un site dédié où l’on peut choisir des amulettes « chance », « richesse » ou encore « fortune » à des prix, affichés en Ethereum, une cryptomonnaie, qui vont de 45 et 1.800 dollars.
La vente est ouverte jusqu’au 11 juillet et pour le moment 1.500 des 8.000 jetons disponibles ont été vendus, essentiellement à des acheteurs thaïlandais.
Cérémonie de bénédiction d’amulettes numériques, le 9 juin 2021 à Bangkok, en Thaïlande (COURTESY OF EKKAPHONG KHEMTHONG/AFP – Daye CHAN)
Parmi eux, Theerapong Lertsongkram, un chef installé en Suède, grand adepte des objets bénis par le vieux moine Luang Pu Heng.
« J’ai eu plusieurs expériences chanceuses, comme gagner de petits prix de loterie… ou être promu à mon travail », a-t-il déclaré à l’AFP.
« Je ne connaissais rien aux NFT avant, mais j’ai décidé de me lancer car je respecte beaucoup Luang Pu Heng », a-t-il ajouté.
Mais un autre collectionneur, Wasan Sukjit, qui orne l’intérieur de son taxi d’amulettes rares, a plus de mal avec le concept.
« Les amulettes doivent être quelque chose de physique, que les gens peuvent tenir à la main », se moque-t-il.
« Je préfère celles que je peux accrocher à mon cou ».
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