Qu’on se rassure, Taishan n’est ni Tchernobyl ni Fukushima. L’incident sur le réacteur n° 1 de la centrale nucléaire, un EPR construit avec l’aide d’EDF dans le sud de la Chine, n’a pas entraîné de rejets radioactifs dans l’atmosphère. Alors, pourquoi tant de questions inquiètes sur une fuite qui n’a même pas été classée sur l’échelle internationale de gravité des événements nucléaires (INES) ? Précisément parce qu’il s’agit du nucléaire ; et que l’incident est survenu dans l’empire du Milieu, qui est aussi le monde du silence. La transparence, qui reste un combat dans les pays démocratiques, y règne moins qu’ailleurs.
Les informations ont été distillées après être passées au crible des autorités, furieuses que ce dysfonctionnement ait été révélé par les Américains via la chaîne de télévision CNN. EDF a obtenu des éléments techniques ; et son partenaire historique, China General Nuclear Power Group (CGN), a affirmé que la situation radiologique était « normale » autour du site. Sans fournir toutes les données réclamées.
Une semaine après avoir été prévenu de la fuite de gaz rares chargés de radioactivité dans le circuit de refroidissement, EDF attendait toujours une réponse à sa demande de convocation d’urgence d’un conseil d’administration de TNPJVC, la coentreprise CGN-EDF exploitant la centrale. Le groupe français, qui en détient 30 %, court après les informations et ne semble plus considéré comme un partenaire d’égal à égal. L’époque où il partageait avec CGN les retours d’expérience est révolue.
L’opacité nourrit le complotisme
L’Etat-parti incarné par le président Xi Jinping contrôle la communication urbi et orbi. Les enquêteurs de l’Organisation mondiale de la santé en ont fait l’expérience cet hiver : ils n’ont pas obtenu toutes les données souhaitées lors de leur inspection à Wuhan, épicentre de la pandémie de Covid-19. Et disposera-t-on un jour de l’ensemble des éléments sur l’explosion d’un dépôt de produits très toxiques sur le port de Tianjin, en août 2015, qui avait fait, selon le bilan officiel, 173 morts et près de 800 blessés ?
L’incident de Taishan peut être imputable à un défaut de fabrication dans l’usine française de Framatome, exonérant la Chine de toute responsabilité. A moins que CGN n’ait maintenu le réacteur en activité, sur injonction politique, pour ne pas aggraver la pénurie d’électricité qui frappe cette région très industrialisée, laissant se dégrader une fuite des barres de combustibles connue depuis octobre. Dans un secteur aussi sensible que le nucléaire, l’opacité nourrit le complotisme. Elle est amplifiée en Chine par le dogme de l’infaillibilité du modèle socialiste et le sentiment, exalté par Xi, de sa supériorité sur l’Occident.
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L’article « Le durcissement du régime chinois depuis l’accession au pouvoir de Xi Jinping incite les entreprises étrangères à redoubler de prudence » est apparu en premier sur zimo news.