Président de la Fédération française de motocyclisme (FMM) depuis octobre, Sébastien Poirier se réjouit des succès de Fabio Quartararo et Johann Zarco, premier et deuxième du classement provisoire du championnat du monde de MotoGP cette saison. Si le nombre de nouveaux adhérents ne décolle pas pour autant, le successeur de Jacques Bolle reste optimiste.
Président, les dernières performances de Fabio Quartararo et Johann Zarco ont été remarquées, commentées et saluées par l’ensemble du monde du sport, considérez-vous ces deux pilotes comme des porte-étendards de la moto française ?
Une Fédération rayonne toujours à travers ses champions. Un Fabio comme un Johann font briller le sport moto et plus généralement le sport mécanique. Même s’ils ne le souhaitaient pas, de par leurs performances exceptionnelles, ils sont des porte-étendards… de la France mais aussi de la moto en général.
Il a fallu attendre longtemps avant de voir un pilote français gagner un Grand Prix en catégorie reine (en juillet dernier, Quartararo s’imposait à Jérez, une première pour un français depuis Régis Laconi en 1999) de quoi faire circuler l’idée que la France n’est pas un pays de moto à l’inverse de l’Espagne ou l’Italie…
Je trouve ça dur. La France est un pays de moto ! La Fédération Française de Moto (FFM) est la première fédération nationale dans le ranking de la FIM (Fédération Internationale de Moto) devant l’Italie et l’Espagne. La France est présente sur toutes les disciplines organisées par la FIM, on a un champion du monde de moto-cross en 2020 avec Tom Vialle, un champion du monde en super moto avec Thomas Chareyre, des champions du monde en endurance-vitesse, c’est plus de 88 titres ces dix dernières années.
On a désormais deux champions qui brillent dans la catégorie reine mais n’oublions pas que Johann (Zarco) a aussi été titré deux fois en Moto2. Le MotoGP est une caisse de résonnance mais de par nos évènements nous montrons que nous sommes un pays de moto. Regardez l’Enduropale du Touquet, le Bol d’Or, les 24h du Mans, le Grand Prix de France de vitesse, ce sont des succès populaires.
Et pourtant, la moto peine à trouver de nouveaux licenciés ?
Nous vivons une crise sanitaire exceptionnelle et comme beaucoup de fédérations nous avons perdu il est vrai beaucoup de licenciés en 2020, nous en perdons aussi en 2021. On est aujourd’hui à 80 000 licenciés et titres de participation, c’est 20 000 de moins qu’en 2019. Ce qui est certain c’est qu’on ne fait pas de la moto comme on fait du footing ou du foot. Aujourd’hui, pratiquer la moto, c’est s’inscrire dans l’un des 1280 clubs de la Fédération, investir dans du matériel, c’est plus compliqué d’accès que pour d’autres sports.
Notre travail est d’offrir une vision claire pour tous ces nouveaux adhérents qui se rêvent en Johann ou Fabio, qu’ils puissent contacter nos clubs ayant une appétence et du matériel pour les accueillir. On a pour cela entamé une révision du système de labellisation, on veut passer d’une cinquantaine à une centaine de clubs labellisés très rapidement.
Certains présidents de clubs estiment que la licence est aujourd’hui trop chère (autour de 300 euros) et que cela freine les jeunes au moment de s’inscrire…
Je ne crois pas, le problème n’est pas de savoir combien coûte une licence mais ce que fait la Fédération avec l’argent de ces licences. Il y a une part importante liée à l’assurance, nous reversons énormément à ces clubs organisateurs (1650euros/club organisateur d’une compétition) puis nous accompagnons aussi le haut niveau. Oui la licence de moto va être plus chère que celle d’athlétisme de foot ou de tennis mais lorsque l’on ramène le coup d’une licence sur le coup d’une saison, ça ne représente rien par rapport à l’investissement général.
Estimez-vous que le territoire est suffisamment fourni en équipements ?
On a aujourd’hui une trentaine de pistes de vitesse sur le territoire métropolitain et environ 500 terrains de motocross. L’objectif est de pouvoir rouler plus facilement sur les circuits de karting, de faire en sorte que nos plus petits puissent débuter sur ces pistes comme en Espagne ou en Italie. Nous travaillons sur l’homologation de certaines pistes, notamment en Provence.
C’est d’ailleurs dans la Ligue de Provence que Fabio Quartararo et Johann Zarco ont commencé, pensez-vous que l’un d’entre eux peut décrocher ce titre de champion du monde ?
J’ai regardé tous les Grands Prix depuis le début de saison et ils ont toujours été présents sauf Fabio quand il s’est blessé au bras. Ils ont la vitesse, l’intelligence de course, Johann a l’expérience, je suis très confiant. Fabio a fait quasiment toutes les pôles, Johann est présent sur les podiums. On a deux français en tête du classement provisoire et c’est mérité, ils le doivent qu’à eux même. Je les trouve sereins, apaisés, ils sont sur une dynamique positive.
J’ai vraiment bon espoir. Ce serait beau pour nous, pour la moto, pour la France. Le MotoGP est suivi dans plus de 200 pays et lorsque Fabio gagne, c’est la France qui gagne à l’étranger. Quand les garçons brillent, qu’il y a une Marseillaise a cappella, que les drapeaux bleu-blanc-rouge viennent bousculer les drapeaux espagnols, c’est une vraie fierté.
A défaut de rapporter des licenciés, ces deux pilotes semblent avoir fait de nouveaux adeptes, un nouveau public s’intéresse désormais aux courses du dimanche.
Clairement. On regarde une fois une course de MotoGP et on est piqué je pense que c’est une évidence. C’est du schéma court, de l’intensité, des dépassements, des français qui brillent. Tout cela fait qu’on a un public plus large qui suit la vitesse de façon générale.
De quoi être optimiste pour l’avenir ?
On a une chance historique d’avoir des champions français en sports mécaniques et il faut qu’on en profite, qu’on structure encore plus pour faire en sorte qu’il y ait un maximum de jeunes qui découvrent la moto dans une structure encadrée, sécurisée et apaisée.
Dans quelques jours débuteront les Jeux olympiques, existe-t-il un désir de voir un jour la MotoGP au programme olympique ?
Il me semble qu’il n’y a jamais eu de sport mécanique aux Jeux Olympiques si ce n’est le motonautisme lors des premières éditions (le motonautisme était inscrit en sport de démonstration aux Jeux Olympiques de Paris en 1900 puis en sport officiel à Londres en 1908). Cela me paraît très difficile d’organiser une course MotoGP comme une course de F1 d’ailleurs.
C’est très professionnel, on est loin du standard des Jeux, ça voudrait dire utiliser un circuit de vitesse et d’autres difficultés… je ne pense pas que ce soit dans leur ligne directrice. En revanche, on travaille pour faire adopter le trial électrique au programme. On aimerait une première invitation comme sport de démonstration.
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